Felix lifts his fist in the air

Photo : Tennis TV

Il y avait de l’émotion, ce 2 novembre, au palais omnisport de Paris-Bercy.  

Dans cet amphithéâtre maintenant nommé Accor Arena, un spectateur français était assis aux côtés de Sam Aliassime. Et, ravi, il se délectait de constater à quel point le fils de son voisin d’estrade avait justifié tous les espoirs placés en lui. 

Cet homme, Louis Borfiga, n’allait assurément pas rater le passage de ce jeune homme qu’il a vu grandir pendant la parenthèse de 15 années passées au Québec pour le compte de Tennis Canada.  

Image : Tennis TV 

Installé à quelques mètres de l’action, en compagnie d’un autre Français, Frédéric Fontang, entraîneur de Félix, Borfiga avait le plaisir de voir que tous les attributs du jeune Montréalais étaient maintenant en place et pouvaient lui permettre de rêver au plus haut niveau.  

Lors d’un entretien téléphonique, quelques jours plus tard, il ne s’est d’ailleurs pas gêné pour me rappeler ce qu’il m’avait dit, il y a cinq ans et demi à Montréal, alors que Félix et son ami Denis Shapovalov remportaient des victoires dans les tournois de catégorie « Futures » et « Challenger ».  

Qu’il avait l’étoffe d’un futur numéro un mondial. 

Une affirmation répétée — coïncidence — le même jour par le Montréalais de 22 ans lors d’une visioconférence avec des journalistes québécois et canadiens qui voulaient faire le point après cette saison phénoménale et les Finales ATP auxquelles il s’apprête à participer. 

J’y reviendrai plus loin. D’abord, voyons ce qu’a vécu Borfiga durant ces quelques jours à Paris-Bercy. 

C’est en croisant FAA, son père Sam et Fontang dans le salon des joueurs que Borfiga a reçu une invitation pour les accompagner dans la loge pour la première manche du match contre Mikael Ymer.  

Il a avoué que les deux sont restés… très connectés. 

« Même s’il est à Monaco ou ailleurs dans le monde, on s’écrit souvent des messages », révèle Borfiga. Chaque fois qu’il gagne un match ou qu’il se prépare pour le suivant, je le félicite ou je lui souhaite bonne chance pour la suite. Et puis je dois dire qu’il répond vite. C’est incroyable, il me répond dans les cinq minutes chaque fois. »  

Malgré ses 22 ans, Félix a déjà une réputation hautement enviable au sein de la confrérie de l’ATP. Tant comme athlète que comme être humain. Et l’une de ses qualités, c’est la reconnaissance et la fidélité en amitié.

Photo : Tennis Canada 

L’homme de 68 ans a été touché de la réaction de Félix. « Je dois avouer que lorsqu’il m’a vu dans le salon des joueurs, avant son match, j’ai vu son grand sourire et il semblait vraiment content de me voir. Ça prouve que c’est vraiment un garçon incroyable. » 

Malgré sa formidable séquence automnale, plusieurs amateurs de tennis ont trouvé que les médias s’emballaient un peu vite, parce que plusieurs adversaires du Montréalais étaient classés hors du Top 20 ou du Top 50. 

« Ceux qui disent ça ne connaissent pas le tennis », s’insurge Borfiga. Peu importe le niveau, 250 ou 500 ou 1000, ce n’est jamais facile de gagner un tournoi. Alors, en gagner deux ou même trois d’affilée, c’est fort. Et ceux qui disent qu’il n’a pas battu de bons joueurs, rappelons qu’il a battu Alcaraz et Rune en demi-finale et en finale, à Bâle, un ATP 500. » 

Le lendemain, c’est un autre de ses anciens élèves qui allait affronter Félix. Nul autre que Gilles Simon. Un dilemme se présentait alors à ce professeur de carrière. Qui allait-il appuyer ? Il a choisi la solution la plus logique, l’absence. « Je ne voulais pas être sur place. Où que je sois dans le stade, ç’aurait été interprété d’une façon ou d’une autre. D’ailleurs, dans son discours d’après-match, Simon a déclaré : “J’ai bien remarqué que Luigi n’était pas dans la loge de Félix”… Donc, Gilles y a quand même pensé et il a regardé. Non, j’étais tranquillement dans mon salon. »  

Borfiga ne se faisait pas d’illusion quant au dénouement de ce duel FAA-Simon. En raison des deux éprouvants marathons livrés par le Français et de son âge (37 ans). S’il a versé une larme, comme prévu, en assistant au chant du cygne par son compatriote, il a souligné que son « Gillou » avait été heureux que son dernier match ait été disputé face à Félix. 

Photo : AP 

« Gilles était content de finir sa carrière contre Félix. Parce qu’il le respecte beaucoup. Rappelez-vous, il a même dit dans son discours sur le terrain qu’il appréciait le joueur canadien et qu’il était un des plus gentleman sur le circuit. » Sans oublier cette requête du nouveau retraité : « Je demande au public français d’encourager Félix lors de ses prochaines présences dans l’Hexagone. C’est quand même un bel hommage. On sentait qu’il y avait entre les deux une incroyable connivence. » 

Pas surprenant d’avoir vu Simon inviter son rival, en compagnie de Français ayant marqué son parcours, lors des photos immortalisant cette sortie de piste. 

Photo : ATP Tour

En revenant sur cette superbe année 2022… à 22 ans, Borfiga y voit la confirmation de ses plus beaux souhaits. « C’est énorme, de cogner à la porte du Top 5 à 22 ans. Il faut mesurer l’exploit de ce jeune garçon. Félix, là, est parti pour de bon ! » 

Félix lui-même a partagé la grande confiance qu’il a en ses moyens, quelques jours plus tard, par le biais d’une rencontre virtuelle, organisée par son agent Bernard Duchesneau et destinée aux journalistes de médias canadiens. 

En commençant, on a rappelé à Félix que le grand John McEnroe avait affirmé plusieurs fois qu’il voyait en lui un futur numéro un mondial. Se sentait-il prêt à commenter à nouveau ce compliment ? 

Photo : Laver Cup 

« Je suis d’accord avec John », a-il déclaré d’entrée. Sans brûler d’étapes, sans me mettre trop de pression (…) je suis de plus en plus convaincu, et les gens autour de moi le sont aussi, que j’ai ce qu’il faut pour l’être. Bon, c’est sûr qu’ensuite, je dois livrer la marchandise, ce qui n’est jamais facile », a-t-il ajouté en souriant.  

Il y aurait une mince possibilité qu’il puisse terminer au 5e échelon, s’il connaît une bonne séquence aux Finales de l’ATP, à Turin (13 au 20 nov.) et si Daniil Medvedev, au contraire, se fait battre. 

Quant à ses attentes en vue du tournoi italien, elles sont là où vous l’imaginez. Hautes.

Photo : ATP Tour

« Tous les joueurs qui y participent, je les ai déjà affrontés, j’en ai battu. Donc pour moi, il n’y a aucune raison que je ne me présente pas à ce tournoi dans le but de le gagner », a-t-il mentionné. 

Cela étant dit, Borfiga a tenu à ajouter son grain de sel concernant les succès actuels de Félix et il a insisté sur les compétitions par équipe, car Auger-Aliassime s’était dressé en véritable leader dans les trois occasions où il a représenté le Canada (Coupe ATP et Coupe Davis) ou encore le Monde (Coupe Laver). Des réalisations qui cimentent la confiance et l’expérience d’un jeune espoir.

Photo : Tennis Canada / Martin Sidorjak (Valence / 2022) 

« Le fait qu’il ait joué la Coupe Davis, au cours des dernières années, ça a été un déclencheur important. Comme beaucoup d’autres joueurs par le passé, en jouant la Coupe Davis, ils ont gagné en confiance. » Et Borfiga d’ajouter en appuyant : « Ne pas jouer la Coupe Davis, c’est une erreur fondamentale qu’ils font. Enchaîner les victoires individuelles, c’est bien, mais gagner pour son drapeau, pour son pays, c’est unique. » 

Impossible de contredire le sage mentor. À ses débuts à la Coupe Davis, en 2019, c’est Félix qui avait donné le point décisif au Canada, contre la Slovaquie, à Bratislava. Déjà, monsieur Borfiga et l’équipe de T.C. étaient fiers de leur recrue.

Photo : Tennis Canada (Bratislava / 2019) 

Les Finales de la Coupe Davis auront lieu à Malaga, en Espagne, du 22 au 27 novembre.  

J’allais mettre fin à mon entrevue en soulignant les qualités athlétiques de Félix et que s’il pouvait continuer à éviter les blessures, tout lui était permis. C’est alors que Borfiga a tenu à y aller d’une affirmation très intéressante. 

« Oh, mais attends… tu sais pourquoi il n’est pas blessé souvent ? Mais moi, j’vais vous l’dire, pourquoi. Parce qu’il a le meilleur préparateur physique du monde ! » 

Et c’est là que le nom de Nicolas Perrotte s’est glissé dans la conversation.  

Car, à son arrivée au pays en 2006, Borfiga apportait son répertoire téléphonique personnel. C’est ainsi qu’ont été recrutés les Guillaume Marx, devenu son remplaçant chez Tennis Canada, Frédéric Fontang qui a succédé à Marx comme entraîneur de Félix, ainsi que Perrotte (à gauche sur la photo).

Photo : Twitter 

« Il ne parle pas beaucoup, Nicolas. Il est humble. Mais sur le circuit, c’est sûr que c’est le meilleur ! Il ne la ramène pas comme certains Américains le font, mais lui, il est bien meilleur que tout le monde. Il est réputé au niveau international et tout le monde le veut, c’est clair. »

Photo : Radio-Canada (2019 / Madrid) 

Devant un tel plaidoyer, on devine que Tennis Canada ne risque pas de le laisser partir. 

« Ils ne le laisseront pas aller, ils le savent », rétorque Borfiga qui continuait ainsi sur sa lancée. Et Félix le sait aussi. Son père Sam me l’a dit trois ou quatre fois à Paris, Nicolas est extraordinaire ! » 

Toute bonne chose a une fin

Photo : ATP 

Ce titre est certes un des clichés les plus utilisés dans de pareilles circonstances. 

Mais c’est la réalité.  

Après 16 victoires consécutives, la séquence inédite d’Auger-Aliassime a donc pris fin aux mains de la nouvelle coqueluche du circuit, Holger Rune, vainqueur de leur demi-finale à Paris. 

Il s’agit donc d’une séquence historique du tennis masculin canadien, s’arrêtant à un seul gain d’un exploit similaire réussi il y a trois ans par sa compatriote, Bianca Andreescu. 

J’ai mis à jour ce court tableau de la semaine précédente sur les sept meilleures séquences victorieuses par des athlètes canadiens sur les circuits de la WTA et de l’ATP. 

B. Andreescu172019
F. Auger-Aliassime162022
B. Andreescu102019
E. Bouchard102014
M. Raonic92016
F. Auger-Aliassime 82022
M. Raonic82011 / 2012 / 2013

L’invasion des ados

Photos : Panorama 

Des adolescents qui accèdent au Top 10 de l’ATP, ça ne se voit pas tous les jours. Ni toutes les années. 

En 2022, ils sont pourtant deux à avoir réussi l’exploit.  

Carlos Alcaraz a connu une année 2022 sensationnelle comprenant le titre d’un tournoi du Grand Chelem et l’accession au trône masculin. Mais ce qu’a accompli Holger Rune au cours des dernières semaines est tout aussi étourdissant. Dossier de 19-2 avec quatre finales consécutives et deux titres. Son plus récent, le Masters 1000 de Paris, où il a battu consécutivement cinq joueurs du Top 10.  

ILS font peur. 

Avec l’arrivée du Danois, on recense un total de 22 ados à avoir percé le Top 10 dans l’histoire du classement ATP (1973). Et comme vous le constaterez dans la liste, plus bas, il n’y a pas eu beaucoup de feux de paille dans le lot. 

Reste à savoir comment les deux derniers ajouts à ce groupe sélect se comporteront au cours des prochaines années. Nés à six jours d’intervalle, au printemps 2003, nos deux jeunes loups se connaissent depuis longtemps.

Image : Youtube 

Ces deux ados, alors âgés de 13 ans, ont fait équipe en double au Mondial Lacoste — aussi connu sous le nom de « Petits As » — qui se déroule depuis plusieurs années à Tarbes, en France, et qui s’est établi comme le plus prestigieux tournoi pour joueurs de 14 ans et moins. 

Vous verrez… ils ont à peine changé, depuis 2013 


Courriel : privard@tenniscanada.com 

Twitter : @paul6rivard 

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