Denis Shapovalov a eu besoin de cinq manches et de plus de sept heures, mardi, pour se départir de Philipp Kohlschreiber en des comptes de 6-4, 4-6, 6-3, 5-7 et 6-4 et ainsi accéder au deuxième tour de Wimbledon.
Les joueurs se sont battus pendant trois heures et 35 minutes, la pluie était survenue alors que la dixième tête de série menait deux manches à un contre l’Allemand (115e) et allait servir à 5-6 à la quatrième manche.
À cause des précipitations persistantes, le duel n’a pu recommencer que quatre heures et 10 minutes plus tard sur le Court 12.
À la reprise, Shapovalov a connu toutes sortes d’ennuis, à commencer par une double faute, puis deux fautes directes de part et d’autre d’un coup gagnant de Kohlschreiber pour perdre son service à zéro, ce qui a forcé la tenue d’un cinquième acte.
Les deux joueurs ont aisément conservé leur service jusqu’à 3-3. Comme pour rendre la pareille à Shapovalov, Kohlschreiber a alors commis trois fautes directes regroupées autour d’une bombe gagnante en coup droit du Canadien, pour concéder son service.
Le Canadien n’avait plus qu’à gagner ses deux jeux au service pour signer le gain, son premier à Wimbledon depuis sa victoire aux dépens de Jérémy Chardy en 2018.
Une statistique intéressante concernant l’Allemand de 37 ans est qu’il avait remporté 12 de ses 13 derniers affrontements contre des gauchers comme Shapovalov — l’explication suggérée étant que son excellent revers à une main était idéal pour contrer le patron de jeu habituel des gauchers qui consiste à frapper des coups droits en croisé sur le revers des droitiers. Cette statistique est maintenant de 12 de ses 14 derniers matchs, principalement parce que c’est le coup droit de Kohlschreiber qui a flanché dans cet important septième jeu de la manche ultime.
On a souvent l’impression que deux Shapovalov se présentent sur le terrain — le bon Denis et le mauvais Denis. Le bon Denis est un maestro qui laisse simplement aller ses coups explosifs qui laissent ses adversaires impuissants, le mauvais Denis est celui qui a tendance à commettre beaucoup de fautes directes et permet ainsi à ses rivaux de rester dans le match.
C’est ce dernier qui a perdu quatre points d’affilée à 3-4 de la quatrième manche — trois fautes directes, dont une double faute. Peter Fleming, un Américain de 66 ans qui a occupé le huitième rang mondial en 1980 et qui est surtout connu comme le partenaire de double de John McEnroe, commentait le match à la télévision et a déclaré à ce moment-là : « C’était un jeu épouvantable. Si vous voulez savoir pourquoi Shapovalov n’est pas encore un joueur du Top 10, ce match en est la preuve. Avec un tel talent, on s’attendrait à ce qu’il soit dans le Top 5 et qu’il soit un sérieux prétendant au titre des grands tournois. »
Fleming a rapidement reconnu qu’il venait de réaliser que Shapovalov avait atteint le Top 10 (pendant une semaine en septembre dernier), mais il voulait surtout souligner que le talent brut du Canadien ne connaît pas de limites.
Alors que les statistiques du match semblent confirmer l’arme à double tranchant qu’est le jeu de Shapovalov — 58 gagnants et 57 fautes directes —, la plupart des joueurs accepteraient volontiers ces chiffres comme le prix à payer pour gagner en jouant du tennis agressif et offensif. Ce qu’ils n’accepteraient pas, cependant, c’est que les 14 aces de Shapovalov ont été surpassés par ses 16 doubles fautes.
Kohlschreiber, qui participait à Wimbledon pour la 16e fois de sa carrière, a terminé le match avec 30 coups gagnants et 26 fautes directes. Il a fait de son mieux pour tenir tête à Shapovalov, mais ses espoirs reposaient sur les baisses de niveau de son adversaire. Il y en a eu assez pour forcer la tenue de cinq manches, mais il tirait toujours de l’arrière et, lorsque Shapovalov a limité les fautes à la cinquième manche, il n’a pas pu faire grand-chose pour le déstabiliser.
« Gagner ce match est formidable », mentionnait Shapovalov. « Surtout contre un bon joueur comme Philipp. Je suis un grand amateur de son jeu. Je l’ai souvent regardé à la Coupe Rogers quand j’étais plus jeune et j’ai toujours aimé sa façon de jouer. Je suis content d’avoir pu m’en sortir, d’avoir joué comme je l’ai fait et d’avoir pu trouver les bons coups quand j’en avais besoin, surtout contre Philipp, qui est vraiment sous-estimé en ce moment. Il a évidemment chuté au classement à cause de ses blessures, mais c’est un adversaire très coriace. »
Après le match, Shapovalov a parlé de sa décision de ne pas participer à Roland-Garros. « Cela m’a permis de reposer mon épaule et de me recentrer. Et aussi la rééducation et tout — me renforcer un peu plus, me préparer pour le gazon. Jusqu’à maintenant, tout se passe bien. J’ai probablement connu ma meilleure saison sur gazon, c’était assurément la bonne décision. »
Après quatre ans sur le circuit professionnel, a encore beaucoup de travail à faire, mais son 12e rang mondial montre qu’il est sur la bonne voie. Une donnée qui ressort particulièrement est qu’il est en tête du circuit pour le nombre de balles de bris effacées (73 %).
Au deuxième tour, il sera opposé à Pablo Andujar, qui a surpris Roger Federer à Genève avant Roland-Garros. Mardi, l’Espagnol de 35 ans a eu raison de Pierre-Hugues Herbert en cinq manches de 7-6(9), 4-6, 7-6(7), 5-7 et 8-6. Lors de leur seule rencontre précédente, Shapovalov a battu Andujar 6-2, 6-3 et 7-6(3) au premier tour des Internationaux d’Australie de 2019.
Il s’est montré un peu timide en parlant de ses chances à Wimbledon cette année. « J’espère que dans quelques années, je serai un sérieux prétendant au titre. Je pense que cette surface sied bien à mon jeu. »
À la suite des résultats des deux premières journées, les autres têtes de série de son quart de tableau sont Roberto Bautista Agut (8e) et Dan Evans (22e).
Mercredi, Bianca Andreescu, Leylah Fernandez et Félix Auger-Aliassime entreront enfin en action.
Andreescu sera la première sur le terrain, à 11 h (6 h, HE) contre Alizé Cornet. Fernandez disputera le troisième match sur le Court 6 contre Julia Ostapenko, tandis qu’Auger-Aliassime sera le troisième sur le Court 2 contre Thiago Monteiro.
Vasek Pospisil, qui a battu Roberto Carballes Baena au premier tour lundi, se mesurera à Frances Tiafoe (57e) — quatrième match sur le Court 5. L’Américain de 23 ans a été brillant lorsqu’il a éliminé la troisième tête de série, Stefanos Tsitsipas, lundi.
« C’est un joueur athlétique super dangereux », commentait Pospisil à propos de Tiafoe. « Depuis les trois ou quatre dernières semaines, il joue très bien et a remporté un Challenger à Birmingham. Il est très confiant. Il joue bien sur le gazon, il a un excellent revers. »
Les prévisions météorologiques sont meilleures pour mercredi, jeudi et vendredi, mais il y a de fortes probabilités d’averses samedi et dimanche. Et ce dimanche sera le dernier dimanche « du milieu » où il n’y aura pas de matchs, car à partir de 2022, Wimbledon sera un tournoi de 14 jours sans interruption.
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Pas besoin d’explication.
Photo de l’article : Martin Sidorjak