Vendredi-causerie : Wimbledon doit ajuster les têtes de série

Prenez un moment pour vous rappeler vos cours de science au secondaire. C’est peut-être différent à l’extérieur du Canada, mais dans notre pays, il y a trois matières de base : la biologie, la chimie et la physique. Même si ces trois matières relèvent de la science, les gens n’excellent pas nécessairement dans chacune d’entre elles.  

La même distinction peut s’appliquer aux terrains de surface dure, de terre battue et de gazon. Bien qu’ils soient tous des courts de tennis, le style de jeu des joueurs est souvent plus adapté à une surface plutôt qu’à une autre. Imaginez maintenant une note en sciences basée sur la combinaison des trois matières : 65 % de biologie, 25 % de chimie et 10 % de physique.  

Enfin, imaginez un concours de physique où les étudiants sont classés sur la base de la note qui n’était que de 10 % de physique. C’est exactement de cette façon que Wimbledon détermine ses têtes de série en 2022. Toutes les têtes d’affiche de ce tournoi du Grand Chelem sur gazon sont fondées sur une majorité de tournois qui ne sont pas disputés sur l’herbe.  

Wimbledon détermine les têtes de série selon le classement mondial. Le problème est que ce classement ne reflète souvent pas l’aptitude des joueurs sur le gazon. Au cours des deux premiers tours, beaucoup de « surprises » avaient été prédites par les analystes et les amateurs.  

L’un des meilleurs exemples est celui de Casper Ruud (3^e). Le Norvégien a atteint le meilleur classement de sa carrière à la suite de sa participation à la finale de Roland-Garros sur terre battue. À son arrivée à Wimbledon, il n’avait jamais gagné un match sur gazon. Son adversaire, Ugo Humbert, 112^e mondial et donc joueur négligé, était considéré comme le favori, car il était le meilleur des deux sur l’herbe et possédait une fiche de deux gains et un revers contre Ruud.  

Un autre bon exemple est celui d’Emma Raducanu, 10^e tête de série du tableau féminin. Elle a été « surprise » par la Française Caroline Garcia, qui venait de remporter le titre du tournoi sur gazon de Bad Homburg quelques jours plus tôt.  

Aucune personne qui suit régulièrement le tennis n’a vraiment été surprise par les résultats de ces matchs. C’est un problème pour les joueurs de haut niveau qui travaillent fort pour faire partie des têtes de série et qui doivent se mesurer à un coriace adversaire tôt dans le tournoi.  

Cela ne survient pas seulement à Wimbledon. Même s’il y a un peu plus de tournois que sur terre battue que sur gazon, il ne serait pas mauvais que Roland-Garros ajuste aussi ses têtes de série. Cette année, les quatre plus sérieux prétendants au titre (Djokovic, Nadal, Zverev et Alcaraz) étaient tous dans la même moitié du tableau. Rafa et Novak ont croisé le fer en quart de finale, un match qui aurait sans doute dû être la finale. Un joueur qui a remporté le tournoi à 13 reprises ne devrait jamais être la cinquième tête d’affiche.  

Avant cette année, Wimbledon utilisait sa propre méthode pour établir les têtes de série. Jusqu’en 2021, les têtes de série masculines étaient décidées par un comité ou une formule mathématique en place depuis 2002. Ce procédé était plus rare pour l’épreuve féminine, mais en 2018, Serena Williams avait été désignée 25^e tête d’affiche alors qu’elle occupait le 183^e rang mondial. Une situation semblable aurait pu se produire cette année, car Serena a reçu un laissez-passer pour le tableau principal, mais n’a pas été prise en considération pour les têtes de série. La septuple championne aurait pu affronter n’importe qui au premier tour, y compris la numéro un mondiale Iga Swiatek.

De nombreuses raisons sont invoquées pour expliquer pourquoi les tournois du Grand Chelem respectent les classements mondiaux pour établir leurs têtes de série, et l’une d’entre elles est l’équité. Mais la vraie raison est qu’ils ne veulent pas avoir à gérer les plaintes. Les classements mondiaux sont le moyen le plus facile de justifier le choix des têtes de série, mais ils ne sont assurément pas le plus équitable.  

Voir tomber les têtes de série dès les premiers tours n’est pas bon pour le sport. C’est aussi néfaste pour les joueurs qui perdent ainsi beaucoup de points. On ne peut satisfaire tout le monde, mais il faut parfois prendre des décisions difficiles et celle-ci n’est vraiment pas si difficile.  

Tout ajustement vaut mieux que rien, mais voici que qui devrait être recommandé. Dans un tournoi du Grand Chelem, il y a 32 têtes de série. Les 24 premiers joueurs au classement devraient être assurés d’en faire partie. Ces 24 peuvent être ajustées par un comité. Une formule entraîne moins de controverse, mais elle n’est pas très précise et donne des résultats qui sont souvent trop semblables aux classements réels.  

Les têtes de série 24 à 32 seraient ouvertes à tout joueur du tableau. Les mieux classés auraient la priorité et pour obtenir une de ces places, un joueur moins bien classé devrait satisfaire à l’un des critères suivants : avoir gagné un tournoi sur gazon au cours de la saison, avoir atteint les quarts de finale de Wimbledon lors de l’une des deux dernières éditions, être un ancien champion de Wimbledon ou avoir remporté au moins 30 matchs sur le gazon au cours de sa carrière. Là encore, c’est le comité qui décide.  

Quel que soit l’argument en faveur de l’utilisation des classements ajustés, le tennis est encore et toujours un sport fantastique. Profitez du long week-end de la fête du Canada et allez assister à des matchs divertissants !