Shapovalov points finger to the sky while holding a ball and smiles

Quel soulagement ! 

Voilà un bon bout de temps que je n’avais pas vu Denis Shapovalov livrer quatre matchs consécutifs avec autant de maestria.

Je parle ici des quatre matchs du tournoi ATP 250 de Séoul.

Face à des Jaime Munar (59e), Radu Albot (91e) et Jenson Brooksby (46e) qui, malgré leur rang respectif, lui opposaient un tennis de très bon niveau, Shapovalov les a écartés d’un coup de baguette magique. Ou, devrais-je dire, de raquette magique.

SA raquette magique. Celle qui le fait passer pour un prestidigitateur aux yeux du public.

Mais cette fois, notre sorcier blond était pas mal plus patient avant de jeter le mauvais sort sur son rival.

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Trois sorties quasi parfaites puis une autre superbe démonstration au cours de la finale perdue aux mains du Japonais Yoshihito Nishioka (41e).

Dans cette confrontation, les longs échanges de 20 à 25 coups étaient nombreux, pour le plus grand plaisir des spectateurs et téléspectateurs. Shapovalov a perdu la plupart d’entre eux contre ce métronome que peut être le Japonais, mais le simple fait de patienter de la sorte est un signe clair de maturité. Car, aussi spectaculaires que puissent être les coups gagnants du Torontois, le faible indice de probabilité de réussite est ce qui finit par lui causer du trouble.

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En conclusion, Shapovalov n’a pas à rougir de ce revers de 6-4 et 7-6(5) en finale. Nishioka a disputé un match plus que parfait, selon ses normes.

De là à se demander comment ce joueur a pu ne jamais atteindre un classement plus élevé que ce 41e rang actuel. Quand on pense que ce petit joueur, peu puissant, mais formidablement résilient, a même disputé cinq tournois du Circuit Challenger en 2022. Celles et ceux qui ont pu visionner cette finale doivent encore se demander comment il a pu présenter un tel niveau pendant plus de deux heures.

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Rendons hommage au vainqueur. Mais gardons en mémoire que le jeu de ce « nouveau » Shapo pourrait bien être l’élément déclencheur pour finalement justifier ce potentiel si exceptionnel du gaucher canadien.

En fait, Shapovalov a livré tout ce que son insondable talent peut lui permettre, sans les déchets récurrents que son attitude peut lui faire commettre. Il a fait encore un peu trop de doubles fautes (6 en demi-finale et 6 en finale), mais sa première balle était plus souvent au rendez-vous (65 % de réussite en 4 matchs). Qui plus est, cette propension à reprendre (trop) souvent son lancer de balle de service ne s’est produite qu’à de rares occasions dans tout ce tournoi.

Comprenez-moi bien. Je suis un fan inconditionnel du Torontois depuis que je l’ai vu la première fois chez les juniors. Puis, bien sûr, à la suite de sa percée de 2017 et de sa rapide accession au Top 10.

Mais, lors des années subséquentes, ce potentiel gigantesque devait cohabiter avec cette attitude que les amateurs de poker connaissent trop bien, le style « all in ». Comme le disent bien des commentateurs qui ont vu ses matchs, il n’y a pas un coup d’éclat que Shapo n’a pas tenté. Peu importe si le moment s’y prêtait ou pas.

Et c’est ce qui lui a fait faire du sur place, non sans connaître des performances éclatantes de temps à autre.

Bon, Shapovalov n’a que 23 ans, direz-vous. Il acquiert petit à petit de la maturité et trouvera éventuellement un bel équilibre entre le fait de se faire plaisir et de tenter le coup spectaculaire chaque fois que l’occasion se présentera ainsi que le moment où échanger calmement tout en attendant patiemment l’ouverture.

Et c’est exactement ce que j’ai été à même de constater à Séoul.

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Un tournoi ne fait pas une saison, loin de là, mais il faut commencer quelque part. Ça débute par un repos de trois semaines à la suite des Internationaux des États-Unis puis par la participation à un tournoi ATP 250, où il était quatrième tête de série. Après la disparition des trois premiers, Ruud éliminé (par Nishioka), Norrie blessé et Fritz malade, il était tout à coup le mieux classé à l’orée des demi-finales.

Rappelez-vous lorsqu’il a quitté Montréal, battu au premier tour par Alex de Minaur, Denis chevauchait une horrible séquence où il avait perdu 9 de ses 10 derniers matchs. Cette fois, en quittant la Corée du Sud, il présente un dossier de 7 gains et 3 revers.

J’ai bien hâte de voir comment il finira la saison. Pour mieux préparer la suivante.

Chung, le revenant

Photo : Yonhap News Agency

Cette photo vous rappelle quelque chose ? Ou quelqu’un ?

Ces lunettes aux montures blanches, sans égales dans le monde du tennis, ont vite été, en 2018, la marque de commerce d’un espoir sud-coréen nommé Hyeon Chung. Les lunettes et un potentiel fou.

Après avoir sombré corps et biens en raison de blessures à répétition, voilà que Chung vient d’émerger, près de cinq ans après avoir ébloui le monde en demi-finale d’un tournoi du Grand Chelem. Tentant de justifier (enfin) son immense talent, il effectuait un retour à Séoul. Chez lui, non loin de sa ville natale de Suwon.

Photo : Yonhap News Agency

En compagnie de Soonwoo Kwon, il a disputé trois matchs de double. Le duo coréen s’est incliné en demi-finale devant les deuxièmes têtes de série, le Colombien Nicolas Barrientos et le Mexicain Miguel Angel Reyes-Varela, non sans avoir délecté leurs compatriotes de deux victoires. Voici le résumé de son premier match, ici, entre 1 min 45 s et 4 min 45 s

En même temps que vous, j’ai découvert Hyeon Chung lors de la première édition du tournoi NextGen, en 2017, alors qu’il avait dominé tous ces autres jeunes loups devenus des habitués de l’ATP et qui représentent la période « post Big 3 ».

Je vous rappelle que ce tournoi, réservé aux futures vedettes de 21 ans et moins, a vu passer les Medvedev, Tsitsipas, Rublev, Shapovalov, de Minaur, Tiafoe, Ruud, Hurkacz, Fritz, Sinner, Alcaraz et autres, et il continuera de nous faire découvrir de futurs membres du Top 10.

En 2017, Chung a été le grand champion. Cet automne-là, à Milan et en l’absence d’Alexander Zverev qui occupait déjà le troisième rang mondial, Chung avait survolé le tournoi en disposant de Medvedev, Shapovalov et Rublev, deux fois !

Mais ce beau projet de carrière n’aura pas fait long feu. Et c’est après avoir été ralenti par d’importantes blessures qu’il revenait au jeu le 28 septembre dernier.

Il s’était écoulé deux ans depuis son match précédent. Oui, 730 jours sans disputer du tennis de compétition.

Et, depuis sa présence inattendue au carré d’as des Internationaux d’Australie de 2018, il s’est écoulé 1710 jours… ou 244 semaines.

Vous aviez déjà oublié ? En janvier 2018, lors du premier tournoi du Grand Chelem de l’année, Hyeon Chung s’était payé Medvedev, Zverev et Djokovic consécutivement. Bon, Medvedev et Zverev n’étaient pas les joueurs qu’ils sont aujourd’hui, mais Djokovic, lui, était… Djokovic.

Vainqueur 7-6(4), 7-5 et 7-6(3), le jeune Coréen devait se rendre jusqu’à la demi-finale pour y affronter une autre icône de son sport, Roger Federer.

Mais ce match de rêve n’allait pas durer très longtemps puisque Chung devait déclarer forfait alors qu’il tirait de l’arrière 1-6, 2-5, mis KO par une énorme ampoule au pied gauche. Lui, si rapide et résilient depuis son émergence, n’était pas l’ombre de lui-même face au Maître.

Photo : AP

Quelques mois plus tard (1er avril 2018), il a atteint le 19e échelon en enchaînant trois présences consécutives en quarts de finale, puis une demi-finale, lors des tournois subséquents.

C’est ensuite que s’amorçait sa lente descente jusqu’à la disparition.

Fiche de 10-14 entre le 30 avril 2018 et le 11 février 2019… et blessure au dos qui le mettra à l’écart pendant six mois. Son retour au Challenger de Chengdu, en Chine, est couronné de succès et ce titre permet de croire à une remontée rapide de l’espoir coréen.

Il ne disputera que quatre matchs en 2020, le quatrième et dernier étant une défaite au 2e tour des qualifications de Roland-Garros face à l’Argentin Renzo Olivo, alors 208e mondial. Son dos venait de le lâcher.

Que réserve l’avenir à Hyeon Chung ?

Seul son corps le dira. Mais comment ne pas lui souhaiter d’être exempt de douleur et de pouvoir justifier ce talent pur. Après tout, à 26 ans, il lui resterait 10 bonnes années pour montrer aux autres de quel bois il peut se chauffer.

Photo : Yonhap News Agency

Chose certaine, si quelqu’un a bien appris que tout est relatif dans la vie, c’est bien lui. Sa déclaration, la veille de son match de retour, était empreinte de sagesse et de lucidité.

« Avant, je tenais le tennis pour acquis. Maintenant, je suis simplement reconnaissant d’avoir la chance de mettre mon pied sur le court. »

Bublik : ennemi numéro un

Photo : Tennismajors.com

Roger Federer a pris sa retraite le 23 septembre.

Mais ce même week-end où le tennis perdait son joueur modèle par excellence, il fallait qu’un joueur représentant tout à fait le contraire se manifeste.

Et j’ai nommé le Kazakh Alexander Bublik, 44e joueur mondial.

En pleine finale au tournoi ATP 250 de Metz, en France, Bublik a voulu faire son drôle. Face à l’Italien Lorenzo Sonego (65e), il s’est permis un geste clownesque alors qu’il tirait de l’arrière 6-7, 1-3. Geste clownesque et… insultant.

Et il a eu l’air fou.

Sonego s’est vengé de la meilleure façon possible, en continuant de se battre et en remportant le match par 7-6(3) et 6-2.

Je n’ai rien contre les coups spectaculaires, même inutiles, tentés par les Monfils, Kyrgios et Paire de ce monde. C’est à leurs risques et périls.

Mais frapper une balle avec le manche de sa raquette est, pour moi, une injure à l’endroit de l’adversaire.

Bublik s’est ridiculisé, a perdu le match et, surtout, le peu de crédibilité qu’il lui restait.

Du tennis ou du hockey ?

Photo : La République (Orléans) / Christelle Gaujard

Des coups d’épaule près du filet, c’est ce qu’on voit habituellement lorsque des joueurs de hockey se disputent la rondelle derrière un gardien de but.

Au hockey.

Mais au tennis, on ne s’attend jamais à voir une telle scène. Comme celle diffusée le 29 septembre sur les réseaux sociaux à l’issue d’un match du tournoi Challenger d’Orléans, en France.

Et c’est un joueur du pays qui s’est fait huer. Un joueur qui est en train de s’ajouter à la liste sans gloire des joueurs sanguins, caractériels, colériques ou autre épithète vous convenant.

Le jeune Français Corentin Moutet.

À l’issue d’une belle bagarre de près de trois heures, remportée 2-6, 7-6(3) et 7-6(2) par le Bulgare Adrian Andreev, leur rencontre au filet a certes été inédite et ces images ont fait le tour de la planète.

Par la suite, Moutet s’est expliqué sur son compte Instagram, précisant qu’il n’avait PAS l’intention de s’excuser parce qu’il n’a fait que réagir à un adversaire qui lui a lancé le mot de quatre lettres commençant par « F », suivi de celui de trois lettres commençant par « Y ».

Photo : AFP

Malheureusement pour l’athlète de 23 ans, même les Français commencent à en avoir marre de ses sautes d’humeur, une attitude qui l’empêche de connaître une carrière plus éclatante.


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Twitter : @paul6rivard

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