C’est peut-être parce que le triomphe de Bianca Andreescu aux Internationaux des États-Unis de 2019 était un moment historique pour le tennis et le sport canadiens, que son duel contre la joueuse qu’elle avait battue en demi-finale de ce parcours magique a suscité plus d’émotions, mercredi, au deuxième tour de Roland-Garros, que les victoires de Leylah Annie Fernandez et de Félix Auger-Aliassime.

Ces deux derniers ont progressé sans trop de difficultés — Fernandez 6-3 et 6-2 contre la Tchèque Katerina Siniakova, et Auger-Aliassime 6-0, 6-3 et 6-4 face au qualifié argentin Camilo Ugo Carabelli.

Photo: Martin Sidorjak

Dans un match vedette qui a commencé en début de soirée sur le Court Philippe-Chatrier, presque vide après la bataille de trois heures et demie d’Alexander Zverev et Sebastian Baez, Bencic (14e) s’est imposée d’emblée face à Andreescu. Elle a remporté la manche initiale 6-2 et a mené 5-1 au deuxième acte.

Dès la première balle, jusqu’à ce que la nervosité s’installe alors qu’elle était à un cheveu de la victoire, la Suissesse de 25 ans a été brillante, servant à merveille et frappant la balle tôt avec un synchronisme impeccable et une profondeur irréprochable.

Andreescu a eu quelques moments de génie, mais ce n’est que lorsque Bencic a servi pour le match à 5-2 que le duel a vraiment été animé.

Tout au long du match, on a senti que Bencic était super motivée pour venger sa défaite à Flushing Meadows — un match dans lequel elle a eu une balle de manche au premier acte et a mené deux fois par un bris dans le deuxième. Mais même si elle était en parfait contrôle, de l’autre côté du filet se trouvait la formidable joueuse qui l’avait battue dans le Stade Arthur-Ashe et qui n’allait pas capituler si facilement.

Andreescu n’attendait que la petite brèche pour rétablir un certain équilibre dans le match.

Bencic a commencé à défaillir alors qu’elle servait pour le match à 5-2 — une double faute au premier point, puis trois autres fautes directes qui lui ont fait perdre l’avantage de deux bris. Andreescu a facilement conservé son service pour faire 4-5, et a poussé deux de ses « c’mon » pour se motiver et peut-être intimider son adversaire.

Tout s’est joué sur le service de la Suissesse à 5-4 et la situation aurait difficilement pu être plus tendue. Lorsque Bencic a commis une double faute sur le premier point, elle venait de perdre 12 des 15 points précédents. Elle a ensuite produit un ace (l’un des deux seuls du match !) pour restaurer sa confiance. Cependant, elle a commis une autre double faute à 30-30, ce qui donnait une chance à Andreescu de niveler la marque à 5-5. Qu’a-t-elle fait ensuite ? Elle a produit un service gagnant pour revenir à égalité.  

C’est ce genre de suspense qui a rendu le duel intéressant et Andreescu l’a entretenu en effaçant deux balles de bris grâce à un jeu audacieux et agressif, mais elle n’a pas réussi à repousser la troisième, ratant un retour du coup droit.

Pointage final : 6-2, 6-4.

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« Je pense que c’était un gros match pour un deuxième tour », a avoué Bencic. « Je m’attendais à un match difficile. Dicter le jeu faisait partie de la stratégie, car c’est mon style. Ce n’est pas ce qu’elle aime, elle aussi veut imposer son rythme. Je pense que c’était à qui allait rester la plus solide sur la ligne de fond et je suis heureuse que ce soit moi aujourd’hui. »

Voici les statistiques finales : 17 coups gagnants et 22 fautes directes (donc beaucoup dans les quatre derniers jeux) pour Bencic, comparativement à 12 coups gagnants et 22 fautes directes pour Andreescu.

Compte tenu de la qualité du jeu de Bencic pendant la majeure partie de la rencontre, Andreescu a été un peu trop sévère envers elle-même après le match. « Je pense que je me suis ressaisie et que j’ai commencé à mieux jouer vers la fin de la deuxième manche. Parce que je ne sais pas ce qui s’est passé pendant le match. Je ratais beaucoup. Malheureusement, je ne me sentais pas moi-même sur le terrain. Ouais, c’est vraiment décevant.

« En fait, je n’étais pas nerveuse aujourd’hui. Je ne sais pas ce que c’était. J’ai l’impression d’avoir fait tout ce que j’ai pu, mais rien ne fonctionnait aujourd’hui.

« Je me suis bien préparée pour ce tournoi et j’avais un bon élan dans mes deux derniers tournois. Je me sentais vraiment bien. »

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Les expressions sur les visages de l’équipe d’Andreescu traduisaient l’inquiétude ressentie.

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Après toute l’effervescence autour d’un possible affrontement avec sa compatriote Fernandez au troisième tour, on a demandé à Andreescu si elle était déçue de rater cette occasion. « Je ne savais même pas que c’était une possibilité », a-t-elle répondu. « Ça aurait été génial. »

A-t-elle des conseils pour Fernandez ? « Mon plan de match était d’être agressive dès le début. Je pense donc que si elle peut faire ça et se battre jusqu’à la fin, elle peut gagner. »

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Fernandez a eu toute la latitude dont elle avait besoin contre Siniakova grâce à un bris de service au sixième jeu de la manche initiale pour prendre les devants 4-2. Elle a mis un point final à la manche à 6-3, en 42 minutes, frappant en fond de terrain avec plus de puissance, d’angles et de constance que sa rivale. Elle a ensuite gagné les deux premiers jeux du deuxième acte à zéro en route vers un double bris pour faire 3-0.

Siniakova a réduit cet écart à un bris, mais ce n’était qu’un sursis momentané, car Fernandez n’a ensuite perdu qu’un seul jeu avant de conclure en 71 minutes.

Cette victoire semble être une préparation idéale pour son duel contre Bencic, car elle a produit 19 coups gagnants et a limité ses fautes directes à 10 en plus de concrétiser cinq de ses six occasions de bris.

Fernandez atteint le troisième tour de Roland-Garros pour la deuxième fois (2020) et semble plus à l’aise que jamais cette saison sur la terre battue, signant des victoires consécutives pour la première fois en quatre tournois.   

« Je pense que j’ai disputé un très bon match, surtout lors des points importants », analysait Fernandez. « J’étais contente de rester agressive dans la deuxième manche et de laisser aller mes coups. Je suis contente que les balles soient restées entre les lignes quand il le fallait le plus. »

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Le tableau féminin s’est ouvert lorsque cinq des dix premières têtes de série sont tombées au combat au cours des quatre premiers jours. Quand on lui a demandé si elle prêtait attention à ce qui se passait dans le tournoi, Fernandez, 17e tête d’affiche, a répondu : « J’essaie de me concentrer sur moi-même, mais c’est un peu difficile quand on voit les écrans de télévision partout avec les pointages. J’ai des aperçus ici et là, mais je n’essaie pas de suivre les matchs. Je veux simplement me concentrer sur moi-même, m’améliorer pour chaque match et profiter du temps que j’ai sur le court. »

Elle a affronté Bencic une seule fois. C’était en 2020, à la Coupe Billie Jean King à Bienne, en Suisse. La Canadienne, qui était alors âgée de 17 ans, avait surpris Bencic, 5e à l’époque, en des comptes de 6-2 et 7-6(3) lors du troisième match de la rencontre que le Canada avait perdue 3-1.

Mercredi, à la conférence de presse, Fernandez ne savait pas qui allait être sa prochaine adversaire, mais elle a dit, à propos de Bencic ou d’Andreescu : « Je sais que ce sont de très bonnes joueuses. Ces matchs ne sont jamais faciles. »

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Après avoir perdu les deux premières manches lors du premier tour contre le Péruvien Juan Pablo Varillas, Auger-Aliassime n’a pas perdu de temps mercredi et a empoché la manche initiale en 26 minutes en route vers une victoire en trois manches face à Camilo Ugo Carabelli.

L’Argentin de 22 ans a remporté son premier jeu à la 43e minute du match.

Ugo Carabelli n’a produit aucun coup gagnant, tandis qu’Auger-Aliassime en a réussi huit dans la première manche. Dans l’ensemble du match, la puissance et la constance du Canadien ont eu raison du qualifié.

Ugo Carabelli, qui occupe le 155e rang mondial et qui prenait part à son deuxième match d’un tableau principal d’une épreuve du Grand Chelem ou du grand circuit de l’ATP, a eu besoin de quatre heures et 17 minutes pour venir à bout d’Aslan Karatsev, dimanche. Mercredi, il a connu ses meilleurs moments au deuxième engagement lorsqu’il a talonné Auger-Aliassime dans trois jeux consécutifs de sept minutes — mais n’en a pas gagné un seul. Il n’a concrétisé aucune de ses cinq balles de bris et n’a réussi que six coups gagnants comparativement à 41 pour le Canadien.

Photo: Martin Sidorjak

Sa confiance accrue et sa volonté de monter au filet se reflètent dans son taux de réussite de 28/34 en avant du terrain.

Vendredi, au troisième tour, Auger-Aliassime croisera le fer avec Filip Krajinovic. Le Serbe de 30 ans a atteint cette étape de Roland-Garros pour la deuxième fois de sa carrière (2019) grâce à un gain de 7-6(5), 6-2, 5-7 et 6-1 aux dépens du Croate Borna Gojo, un joueur issu des qualifications. Il s’agira d’un cinquième duel entre Auger-Aliassime et Krajinovic, le Canadien ayant remporté leurs deux plus récents affrontements.   

« Un bon match complet de ma part », a résumé Auger-Aliassime à propos de la deuxième victoire de sa carrière à Roland-Garros. « C’est toujours bien de ne pas perdre son service. C’est génial de franchir une autre étape. »

Lors de sa conférence d’après-match, on lui a posé une question qui revient souvent ces jours-ci à propos de Wimbledon et de son intention d’y participer s’il n’y a pas de points ATP. « J’ai prévu d’y aller. C’est une épreuve du Grand Chelem. Je suis dans le Top 10 maintenant. Au cours des prochaines années, je dois saisir toutes les occasions pour essayer de gagner un de ces tournois. Je ne vais pas laisser passer cette occasion.

« Je pense aussi que le tournoi se déroulera, peu importe de quelle façon. Ensuite, nous allons passer à autre chose. »

RIEN N’ÉGALE ROLAND-GARROS ET PARIS

C’est l’un des secrets des grands chelems : les meilleures fraises ne se trouvent pas à Londres, dans les bols de Wimbledon. En fait, les fraises du All England Club sont ordinaires comparées aux fraises somptueuses et juteuses comme celles que l’on voit ici au marché de la rue Cler dans le 7e arrondissement de Paris.

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