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|08.02.2020; Biel; Tennis Fed Cup – Schweiz – Kanada;

Louis Borfiga, vice-président de l’élite de Tennis Canada, fait partie de l’organisme national depuis 2006. Il est arrivé au Canada après avoir travaillé à la Fédération française de tennis où il a contribué au développement de jeunes joueurs comme Jo-Wilfried Tsonga, Gilles Simon, Gaël Monfils et Julien Benneteau. Borfiga a été une force dynamique dans l’émergence du récent groupe de jeunes joueurs canadiens. Il nous parle d’eux dans cette entrevue.

Q : Comment savoir si un jeune joueur a le talent nécessaire pour réussir dans le tennis professionnel ? Quels sont les éléments clés que vous recherchez ?

LB : C’est une question difficile, car je crois que cela dépend de l’âge du jeune quand vous le voyez et commencez à le suivre — peut-être vers 11 ou 12 ans s’il joue bien. Les critères les plus importants sont l’amour du jeu ainsi que les capacités physiques et tennistiques. Pour atteindre un haut niveau, il ne faut pas avoir de limites techniques, ni physiques, mais surtout techniques parce qu’il faut une base solide à un jeune âge.

Q : On ne peut pas changer la technique ?

LB : On peut modifier la technique, mais il y a parfois des changements qui sont rédhibitoires. Il y a des choses qu’on ne peut pas changer parce qu’elles sont trop importantes.

Q : Vous êtes devenu une sorte de génie, parce que beaucoup de gens ont douté de vous après la rencontre de la Fed Cup en avril 2017 à Montréal — Bianca Andreescu, 16 ans, avait perdu 6-4, 4-6 et 6-4 face à la 31e mondiale Yulia Putintseva avant de marquer le point gagnant pour le Canada en battant la Kazakhe Yaroslava Shvedova, 51e, en des comptes de 7-6(1) et 6-4 — quand vous, un type normalement sage et prudent, aviez affirmé qu’Andreescu allait remporter le titre d’un Grand Chelem. Certains se sont demandé pourquoi vous faisiez une déclaration aussi irréfléchie. C’était presque comme si vous aviez prédit l’an dernier que les Raptors de Toronto allaient remporter le titre de la NBA.

C’était de cette ampleur, alors qu’est-ce qui vous fait dire ça ?

LB : J’ai toujours cru au potentiel de Bianca parce que je la connais depuis qu’elle est toute petite – environ 10 ou 11 ans. Et à 14 ans, je l’avais déjà vu jouer de très bons matchs. Elle a aussi une façon de gagner des matchs grâce à sa force mentale. Lorsque j’ai dit ça (en 2017) après la Fed Cup, elle était âgée de 16 ans et avait joué du tennis de rêve. Elle n’avait pas peur de l’enjeu et j’avais vu qu’elle savait vraiment comment jouer au tennis — elle gagnait déjà des tournois Challenger. J’ai vu qu’elle avait un potentiel supérieur à celui des autres filles. Je n’étais pas sûr, mais je pensais qu’elle avait d’excellentes chances de gagner un tournoi du Grand Chelem.

(Photo: Mauricio Paiz)

Q : Peut-on parler des autres joueurs canadiens — en commençant par Milos ? Qu’avez-vous vu en lui quand il était jeune ?

LB : Quand j’ai vu Milos pour la première fois, je pensais qu’il ferait partie du Top 100 un jour. Et Guillaume Marx (entraîneur de Tennis Canada), qui a travaillé avec lui pendant un certain temps, et Frédéric Niemeyer (entraîneur de Tennis Canada), qui a aussi travaillé avec lui pendant un certain temps — il nous a tous un peu surpris. À 19 ou 20 ans, il avait réalisé des choses auxquelles nous ne nous attendions pas. Nous pensions qu’il serait bon à 22 ans et il l’a été beaucoup plus jeune. Depuis, il a eu une belle carrière ; il a atteint la finale de Wimbledon et a récolté huit titres. C’est très impressionnant.

Q : Qu’en est-il d’Eugenie Bouchard ? Quand l’avez-vous vue pour la première fois et qu’avez-vous vu en elle ?

LB : J’ai connu Eugenie quand elle avait 14 ans. Je l’ai suivie quand elle avait 15 ou 16 ans et elle avait une base assez solide. Elle avait gagné beaucoup de matchs et elle était très régulière. Elle était sérieuse à l’entraînement et elle avait de bonnes chances de réaliser les choses qu’elle a réussi à accomplir.

(Photo : TennisTV)

Q : Et Vasek Pospisil ?

LB : Je ne connaissais pas Vasek aussi bien, mais je l’ai suivi quand il était un junior. Il a commencé à avoir de très bons résultats chez les juniors. C’était un garçon comme Gilles Simon — il adorait jouer et il jouait beaucoup. Il a gagné plusieurs tournois Futures à 18 ans et je ne suis pas du tout surpris qu’il ait ensuite progressé et qu’il ait maintenant une très belle carrière.

Q : Et Félix, c’est celui que vous connaissez depuis le plus longtemps ?

LB : Je le connais depuis qu’il est très jeune. Il avait six ans quand je suis arrivé (à Montréal après avoir travaillé à la Fédération française de tennis) et je l’ai vu par hasard lors des essais pour les jeunes joueurs. À 12 ans, c’était déjà impressionnant de voir la force avec laquelle il frappait la balle. J’ai pensé qu’il pourrait devenir très, très bon. On ne sait jamais ce qui se passera à 14 ou 15 ans, mais il a continué à s’améliorer.

Q : Avait-il quelque chose de spécial ?

LB : Sa frappe de balle était spéciale, sa puissance était incroyable.

Q : Et Denis ?

LB : Je voyais souvent Denis. J’allais souvent à Toronto et je le voyais. Il possédait déjà une puissance naturelle. Il se plaçait trop loin derrière la ligne de fond et André Labelle (entraîneur de Tennis Canada) l’encourageait à se rapprocher. Mais on voyait déjà qu’il avait une facilité un peu comme Henri Leconte (un joueur français des années 1980 et 1990 qui était l’un des attaquants les plus explosifs) dans la façon dont la balle sortait de sa raquette.

(Photo : Urs Lindt/freshfocus)

Q : Et Leylah ?

LB : J’ai aussi vu Leylah quand elle était très jeune, car elle s’entraînait avec André Labelle à Montréal à 10, 11 ou 12 ans. Après cela, elle a suivi son propre chemin, mais elle s’est entraînée longtemps avec l’entraîneur belge Francisco Sanchez. Honnêtement, au fil d’ans, elle jouait de mieux en mieux. Maintenant, elle me surprend beaucoup, car elle a vraiment élevé son niveau. Elle possède quelque chose de vraiment important : elle aime le tennis et elle est hyper motivée et hyper sérieuse. C’est incroyable.

Q : Au fil des ans, êtes-vous devenu meilleur pour prédire qui va être bon, avez-vous acquis une certaine sagesse ? Y a-t-il des choses fondamentales que vous avez apprises ?

LB : J’ai appris que je savais ce que je ne savais pas. Je sais qu’il faut être prudent quand on dit qu’un joueur sera bon ou pas. Il faut prendre un groupe de jeunes joueurs et bien les entraîner avant de savoir. Tirer des conclusions trop tôt… on ne peut pas dire que quelqu’un sera bon ou pas. Il y a toujours beaucoup de surprises.

Q : Y a-t-il des joueurs qui vous ont laissé tomber — des joueurs que vous pensiez meilleurs qu’ils ne l’étaient ?

LB : Pas beaucoup. Ceux en qui j’ai fondé des espoirs ont connu de belles carrières. En ce sens, cela a été très satisfaisant.

Leylah s’illustre au Mexique

(Photo : Abierto Mexicano)

À plus de six mois de son 18e anniversaire de naissance, Leylah Annie Fernandez continue d’étonner en produisant de magnifiques performances sur le circuit de la WTA.

La semaine dernière, elle a eu un remarquable tournoi à Acapulco. Après avoir franchi avec succès les épreuves de qualification, elle s’est inclinée 6-4, 6-7(8) et 6-1 en finale contre la Britannique Heather Watson, 69e mondiale.

Fernandez a gagné deux matchs de qualification, notamment un contre l’Australienne Lizette Cabrera qui l’avait battue en finale du Challenger Banque Nationale de Granby en juillet dernier. Elle en a ensuite remporté quatre au tableau principal, éliminant trois joueuses du Top 100, pour atteindre la finale.

Au début de la saison 2020, elle se situait juste à l’extérieur du Top 200 et avait comme objectif de se hisser au Top 100 avant la fin de l’année. Elle a fait d’énormes progrès au cours des deux premiers mois et occupe maintenant le 126e rang de la WTA.

L’histoire de la famille Fernandez est une source d’inspiration. Leylah Annie et sa jeune sœur Bianca, également une joueuse en herbe, ont déménagé de Montréal à Boynton Beach, en Floride, en 2018 avec leurs parents Irene et Jorge. Les jeunes filles s’entraînent sur les courts publics la plupart du temps et ne tiennent rien pour acquis dans leur quête de succès au tennis.

Les parents ont fait beaucoup de sacrifices et il n’est pas étonnant que Leylah Annie soit une joueuse équilibrée et déterminée. Après qu’elle se soit qualifiée pour les Internationaux d’Australie en janvier — ce qui lui assurait une bourse de 90 000 $ AUS ($80,825 CAN) —, un journaliste français lui a demandé si elle allait maintenant magasiner. Fernandez n’a pas hésité à répondre : « Je n’aime pas magasiner. »

Après tous les efforts déployés par la famille — y compris le fait que Jorge a dû vendre sa voiture à un moment donné —, Leylah Annie n’avait pas l’intention de faire des achats frivoles. « Nous ne sommes pas riches », avait confié son père/entraîneur dans une entrevue à Radio-Canada l’an dernier. « Mais nous sommes riches de nos valeurs et nous allons réussir. »

(Photo : Urs Lindt/freshfocus)

Cette semaine, Fernandez participe au tournoi de Monterrey, au Mexique, après avoir bénéficié d’une exemption spéciale après ne pas avoir pu prendre part aux qualifications en raison de sa présence au carré d’as à Acapulco. Elle devait initialement affronter l’Américaine Lauren Davis, 60e — contre qui elle a perdu 6-4 et 6-2 au premier tour des Internationaux d’Australie. Le tableau a toutefois dû être modifié et Fernandez croisera maintenant le fer avec la Suissesse Stefanie Voegele, 108e mondiale. Ce sera un premier duel entre les deux joueuses, mais elles se sont vues le mois dernier à Bienne, en Suisse, dans le cadre de la rencontre de la Fed Cup entre le Canada et la Suisse. Voegele n’a pas joué, mais Fernandez a signé une fiche d’une victoire et une défaite, battant notamment la cinquième mondiale Belinda Bencic 6-2 et 7-6(3) (photo ci-dessus).

Le match Fernandez — Voegele est prévu mardi, pas avant 16 h HNE.