On assiste à des Internationaux des États-Unis vraiment inhabituels en cette époque de la COVID-19. La foule qui se dirige normalement tous les jours vers le Centre national de tennis Billie Jean King a disparu — tout comme sur la photo ci-dessus de l’arrêt Citi Field (US Open) de la Long Island Rail Road.

En cette fête du Travail, il y aurait normalement eu de nombreux Canadiens à Flushing Meadows pour voir deux des leurs — Félix Auger-Aliassime et Vasek Pospisil — lutter pour une place en quart de finale.

Ce n’était finalement pas écrit dans les cartes pour la 15e tête de série Auger-Aliassme ou pour le 94e mondial Pospisil, mais les deux ont bien paru pour une manche.

C’est Pospisil qui est passé le plus près de remporter la manche initiale lorsqu’il a eu quatre balles de manche au jeu décisif, menant 6-2 contre Alex de Minaur, 21e tête d’affiche. L’Australien de 21 ans a toutefois marqué six points consécutifs en route vers un gain de 7-6(6), 6-3 et 6-2. Après le match, Pospisil n’a pas trop regretté la façon dont il a disputé les balles de manche, tandis que de Minaur s’est empressé d’admettre que la chance avait joué un grand rôle dans ce remarquable revirement de situation.

Auger-Aliassime a disputé une solide première manche, remportant 45 points comparativement à 47 pour son rival de 27 ans, l’Autrichien Dominic Thiem, 2e tête de série.

Thiem n’a pas très bien joué — commettant une double faute et trois fautes directes — pour concéder son service au 10e jeu alors qu’il servait pour la manche. Au début du jeu décisif, Auger-Aliassime s’est bien débrouillé dans les échanges, et a pu se sortir de quelques situations délicates grâce à de magnifiques services aux moments opportuns.

Ce duel de huitième de finale s’annonçait donc fascinant entre le jeune Canadien, un meneur de la « prochaine génération » et Thiem, un joueur qui a déjà fait ses preuves sur le circuit avec trois finales du Grand Chelem, dans une catégorie juste un cran sous la troïka composée de Novak Djokovic, Rafael Nadal et Roger Federer.

Au deuxième acte, Thiem est parvenu à ravir le service d’Auger-Aliassime pour mener 2-0 et a rapidement pris le contrôle du match, s’envolant avec une victoire de 7-6(4), 6-1 et 6-1.

Après avoir été si serré à la première manche, le total des points gagnés était de 100-68 en faveur de Thiem, qui a conclu la rencontre sur un revers en flèche le long de la ligne après deux heures et sept minutes de jeu.

« Nous avons eu de bons échanges, de bons points au début de la deuxième manche », mentionnait Auger-Aliassime. “Puis, le fait de ne pas remporter ces points, de perdre mon service tout en pensant que ce n’était pas si pire… cela lui a vraiment donné confiance et m’a fait du tort plus que tout.”

« À partir de là, ç’a été vraiment difficile. Il jouait très bien, ses balles étaient lourdes et moi, je jouais de plus en plus mal. »

En parlant de la qualité du tennis de Thiem, finaliste des Internationaux d’Australie de 2020 et finaliste de Roland-Garros au cours des deux dernières années, Auger-Aliassime a commenté : « Ce n’est pas seulement l’effet dans sa balle, c’est le fait qu’il joue loin en fond de terrain et que tu as l’impression de ne pas avoir beaucoup d’ouvertures. J’essaie de prendre la balle tôt et dans le terrain, donc ces coups sont très difficiles à gérer. J’ai été capable de m’en sortir à quelques occasions, mais il y a des fois où c’était vraiment difficile à contrôler. Il est probablement assez unique — peut-être avec Nadal. C’est vraiment un style de jeu différent des autres joueurs du circuit. »

À son cinquième tournoi du Grand Chelem seulement, Auger-Aliassime a réalisé sa meilleure prestation en accédant aux huitièmes de finale. Il devrait se hisser au Top 20, autour du 19e rang.

« Les choses se sont plutôt bien passées pour moi », concluait Auger-Aliassime à propos de son expérience aux Internationaux des États-Unis de 2020. « Heureusement, tous mes tests de dépistage (pour la Covid-19) ont été négatifs pendant mon séjour ici, ce qui m’a permis de participer au tournoi sans problèmes. Malgré quelques controverses et une certaine malchance pour certains joueurs, ils ont réussi à bien organiser le tournoi et ce fut une bonne expérience en général pour le confort. Dans mon cas, cela a aussi été une bonne expérience sur le terrain. Je peux tirer beaucoup de choses de ces deux semaines, mais c’est quand même difficile de terminer ainsi. »

Il dit qu’il prévoit partir pour Rome dans les prochaines 48 heures et qu’il jouera là-bas en préparation pour Roland-Garros, qui commence le 27 septembre.

Pospisil ne se rendra pas en Europe aussi rapidement. Il a l’intention de s’entraîner sur la terre battue en Floride avant de se diriger tôt vers Paris pour se refamiliariser avec l’argile. Il espère remporter sa première victoire en sept tentatives au tableau principal de Roland-Garros.

Lundi, sur le Court Louis-Armstrong, Pospisil a joué la plus grande partie de la première manche comme le joueur qui a surpris la 25e tête de série Milos Raonic au deuxième tour et la 8e Roberto Bautista Agut au troisième tour.

Mais un problème de quadriceps droits et une blessure abdominale subie un peu plus tôt l’ont finalement rattrapé. Il n’a pas été en mesure de reproduire son jeu agressif.

« Aujourd’hui, le facteur principal était physique », confiait le joueur de 30 ans. « On n’est pas arrivé à un point où c’est le meilleur joueur de tennis qui aurait décidé de l’issue du match. Aujourd’hui, j’ai l’impression qu’il était nettement meilleur que moi physiquement, et c’est ce qui a finalement été le facteur décisif. »

En parlant de la rapidité de de Minaur, Pospisil a ajouté : « Alex est très rapide, et ce qui est le plus impressionnant, c’est qu’il ne respire jamais », a-t-il plaisanté. « Il court d’un côté et de l’autre sans jamais s’essouffler. C’est vraiment un phénomène de la nature et il est extrêmement en forme. »

« C’est dur, surtout pour un trois de cinq quand il fait chaud et que c’est plus tard dans le tournoi et que tu ne te sens pas si bien. Je pense que si j’avais été aussi en forme qu’au début du tournoi, j’aurais eu plus de chances. Cela aurait quand même été un match difficile, mais je pense que c’est peut-être pour ça que je n’ai pas obtenu autant de succès. »

Son adversaire australien était bien conscient du potentiel de Pospisil, mentionnant dans une entrevue d’après-match : « Si cela avait été sa journée, il m’aurait battu à plate couture. »

Le ratio coups gagnants/fautes directes révèle les forces des deux compétiteurs : Pospisil a terminé avec 43/48, tandis que de Minaur était 16/13.

C’était un combat entre David et Goliath, mais Pospisil ne peut pas être trop découragé par le résultat de lundi et sa présence au quatrième tour est son meilleur résultat en tournois du Grand Chelem depuis son quart de finale à Wimbledon en 2015.

Mardi, Denis Shapovalov tentera d’accéder à la première demi-finale d’un Grand Chelem de sa carrière lorsqu’il croisera le fer avec Pablo Carreno Busta, 20e tête d’affiche du tournoi et 27e au classement de l’ATP.

Shapovalov, qui est déjà le premier Canadien à atteindre cette étape du tableau féminin d’un Grand Chelem, n’aurait pas pu être plus impressionnant dans sa victoire de 6-7(0), 6-3, 6-4 et 6-3 face à David Goffin, 7e, lundi soir.

Faisant preuve d’une nouvelle maturité, Shapovalov a été patient et a presque mis Goffin au défi de suivre le rythme dans les échanges en fond de terrain. Le Belge de 29 ans n’a pas pu égaler la puissance du jeune joueur de 21 ans de Thornhill, en Ontario. Et à la fin du match, il avait l’air d’un homme fatigué et complètement battu.

En revanche, Shapovalov avait l’air frais et fringant, et, bien que les chiffres ne reflètent pas toujours le déroulement d’un duel, ceux-ci le font. Dans le passé, s’il avait produit 52 coups gagnants (dont 13 aces) comme il l’a fait lundi soir, il aurait également commis autant, sinon plus, de fautes directes. Mais il n’a commis que 46 fautes directes. Quant à Goffin, il était à 46 coups gagnants et 44 fautes directes.

Shapovalov a superbement bien servi, remportant 53 pour cent de ses deuxièmes balles comparativement à 44 pour Goffin. Il a été fantastique au filet, réussissant 34 de ses 48 (71 pour cent) montées.

Mais ce que l’on a remarqué le plus, c’était sa volonté de rester dans les échanges et de dominer son rival grâce à sa puissance manifestement supérieure et explosive.

« C’était mon plan au départ », admettait-il à propos des échanges en fond de terrain. « Je savais que je ne pouvais pas le battre en étant trop agressif parce qu’il est trop bon pour ça. Il est trop régulier. Il aurait sûrement attendu que je rate quelques coups pour en profiter. »

« J’ai essayé d’être plus régulier. Je pense que Mischa (son entraîneur Mikhail Youzhny) m’a beaucoup aidé à cet égard, de ne pas simplement frapper à pleine puissance de gauche à droite, mais plutôt d’être plus astucieux. C’est un joueur tellement rusé. Je lui suis reconnaissant de m’avoir appris ces choses et de m’aider à les incorporer dans mon jeu. »

Le Denis Shapovalov de dimanche soir est le joueur que plusieurs attendaient de voir émerger de la phase d’apprentissage de sa carrière.

Le prochain défi sera de répéter cette performance mardi soir contre Carreno Busta. L’Espagnol de 29 ans a remporté leurs trois duels précédents sur surface dure — Chengdu et Vienne (automne 2019) et aux Internationaux des États-Unis (2017) sans concéder une seule manche. Mais c’était contre « l’ancien » Denis Shapovalov, et non la version améliorée sous la tutelle de Youzhny et d’un psychologue, ainsi qu’avec le soutien de sa famille et de sa copine Mirjam Bjorklund, 22 ans, deuxième meilleure joueuse de tennis de la Suède qui occupe le 331e rang de la WTA.

« Il m’a battu chaque fois que nous nous sommes affrontés sur surface dure », mentionnait Shapovalov à propos de Carreno Busta, qui a atteint les quarts de finale à la suite de la disqualification du favori Novak Djokovic lors de leur duel de dimanche. « Il ne fait aucun doute que ce sera très difficile. Il est un peu comme David (Goffin) — très, très solide, très régulier en fond de terrain. Ce sera un match semblable pour moi. Je dois jouer mon jeu tout en restant le plus régulier possible. »

Ce duel se déroulera sur le Court Arthur-Ashe après le quart de finale entre Naomi Osaka et Shelby Rogers qui commencera à 19 h

La prime pour Shapovalov est qu’il y a une chance qu’une victoire puisse le propulser vers un statut encore plus rare : le Top 10.

LA DISQUALIFICATION DE DJOKOVIC

La décision du juge-arbitre du tournoi Soeren Friemel de disqualifier le favori et triple champion des Internationaux des États-Unis Novak Djokovic, dimanche, a été prise selon les règles. Fondamentalement, le fait que le Serbe ait atteint une juge de ligne à la gorge avec une balle frappée en geste de frustration, contrevient au règlement d’interdiction de « frapper une balle de façon dangereuse ou imprudente dans l’enceinte sans se soucier des conséquences. »

Il existe des exemples d’une telle situation, notamment Denis Shapovalov (un arbitre de chaise) à la Coupe Davis de 2017 à Ottawa, et Tim Henman (une chasseuse de balles) à Wimbledon en 1995. Malheureusement, si Djokovic avait raté la juge de ligne de quelques centimètres, il s’en serait tiré avec un simple avertissement et aurait pu continuer de prendre part au tournoi.

En 2016, en quart de finale de Roland-Garros contre Tomas Berdych, Djokovic a lancé sa raquette vers l’arrière sans regarder et a raté de peu un juge de ligne. Si la raquette avait touché l’officiel, Djokovic aurait presque certainement été disqualifié. Ironiquement, c’est cette année-là que le Serbe a conquis son seul et unique titre à Roland-Garros.

Il est possible que sa sortie prématurée des Internationaux des États-Unis lui donne plus de temps pour se préparer pour le tournoi sur terre battue de Rome de la semaine prochaine et ensuite pour le Grand Chelem parisien.

Il faut noter que si Djokovic est couronné champion à Roland-Garros, cela signifierait qu’il a remporté chaque épreuve du Grand Chelem deux fois — un exploit qu’il a accompli pour les neuf tournois du Circuit Masters 1000 de l’ATP il y a deux semaines à l’Open Western & Southern.

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