Tebbutt : Malheureux pour Leylah

Écrit par Adélaide Dumont

31 mai 2022

Le fait que Martina Trevisan a eu besoin de 57 minutes pour conclure la rencontre (6-2, 6-7[3], 6-3) après avoir eu sa première balle match en dit long sur indomptable esprit de Leylah Annie Fernandez, même blessée.

Fernandez, qui a reçu des soins pour une blessure au pied droit alors qu’elle tirait de l’arrière à la première manche, a produit un coup gagnant pour repousser cette balle de match, a ensuite remporté le jeu décisif 7-3 avant de donner tout ce qu’elle pouvait pendant une heure. Finalement, Trevisan a concrétisé sa deuxième balle de match après une bataille de deux heures et 20 minutes pour mettre un point final au premier quart de finale de la journée sur le Court Philippe-Chatrier.

Le drame a commencé par un arrêt médical lors duquel la physio a apposé un bandage près des orteils. Fernandez était alors menée 3-2 dans la première manche. Il s’est intensifié quelques instants plus tard lorsque son père/entraîneur a fait un geste indiquant qu’elle devrait arrêter.  

Sans surprise, Leylah l’a tout simplement ignoré, a baissé la tête et a continué de concourir comme elle le fait depuis le début de sa carrière professionnelle, et probablement bien avant.

Après avoir perdu la manche initiale — elle a eu 7 coups gagnants et 14 fautes directes, comparativement à 10 coups gagnants et 4 fautes directes pour l’Italienne —, Fernandez s’est retrouvée en déficit de 3-1 au deuxième acte.

Dans le carnet de notes d’un journaliste, il est indiqué que lors du deuxième jeu de la manche, elle a arrêté sa course « avec précaution » et que, bien qu’elle ne boitait pas, sa démarche était un peu étrange. Fernandez a réussi à niveler la marque à 3-3, mais elle semblait encore vulnérable et ne se donnait pas à fond sur certains coups. Trevisan a ensuite eu cette balle de match lorsqu’elle servait à 5-4. Au bord du précipice, Fernandez a fait ce qu’elle fait si souvent dans les situations de crise : elle a frappé un magnifique coup droit le long de la ligne pour prolonger le duel. Elle a ravi le service de Trevisan après quelques fautes directes de l’Italienne et a poursuivi sur cette lancée dans le jeu décisif, se forgeant une avance de 5-1 avant de conclure à 7-3.

Photo: Martin Sidorjak

Trevisan, quart de finaliste à Paris en 2020 lors de l’édition automnale du tournoi pendant la pandémie, a quitté le court pour une pause-toilette après le deuxième acte. Cela a semblé l’aider à retrouver son calme et n’a peut-être pas rendu service à Fernandez, dont le pied a pu enfler ou se raidir.

La troisième manche s’est rapidement transformée en sens unique pour Trevisan. Elle a pris une avance de 4-0 et n’a pas commis une seule faute directe avant le 34e point lorsqu’elle a raté un coup droit pour faire 40-40 au cinquième jeu.

Fernandez, qui était visiblement ennuyée par son pied, a gagné ce jeu pour revenir à 1-4. Puis a fait 3-5 en remportant son service à zéro, probablement aidée par l’énergie du désespoir.  

Soudain, la tension est revenue dans l’arène et le drame est allé en augmentant, alimentée par les multiples précédents de Fernandez qui a souvent orchestré des remontées spectaculaires. 

Mais il y avait peut-être un prix à payer après la montée d’adrénaline qui lui a permis de jouer ce huitième jeu de façon si incroyable. Alors que Trevisan servait pour le match, Fernandez est parvenue à 15-30, mais l’Italienne a trouvé un dernier souffle pour produire un bon service qui a donné lieu à une erreur du coup droit, puis pour réaliser un coup droit qui a pris Fernandez à contre-pied pour mettre fin à cette bataille de deux heures et 20 minutes.

Ce n’est pas le dénouement qu’avait souhaité Fernandez, surtout que plusieurs lui prédisaient une victoire et une participation à une deuxième finale d’un tournoi du Grand Chelem. Mais elle a néanmoins montré qu’elle était une redoutable compétitrice.

Photo: Martin Sidorjak

Trevisan a dominé au chapitre des coups gagnants (43 contre 29) et mérite d’être félicitée pour avoir continué à jouer son jeu habituel malgré le problème de Fernandez — surtout après la déception d’avoir raté cette balle de match au deuxième acte. « J’étais un peu nerveuse sur la première balle de match, a confié Trevisan. Je pensais trop au fait que j’étais à un point de la demi-finale. Mais l’important est qu’après ce point, j’ai accepté la situation et j’ai continué. »

Fernandez n’a pas été en mesure de donner une entrevue au centre des médias après le match, mais elle a fait ce commentaire à une membre du personnel de la WTA au sujet de son problème au pied : « C’était vraiment de la malchance, aujourd’hui. J’ai senti un peu de douleur avant le match, mais je n’y ai pas repensé. C’est arrivé et je vais devoir en tirer une leçon. »

Elle a également dit à propos de son Roland-Garros : « Pour le moment, j’ai un peu de difficulté à trouver des points positifs, car je voulais vraiment atteindre la demi-finale. Dans quelques jours, je devrais être en mesure de voir ce que j’ai fait de bien et partir de là. »

Le prochain tournoi à son calendrier est une épreuve de catégorie 500 de la WTA sur le gazon de Berlin, à compter du 13 juin.

Photo: Martin Sidorjak

Trevisan, qui porte le prénom de la grande Martina Navratilova, a connu l’adversité au cours de sa carrière, notamment une lutte contre l’anorexie à l’adolescence qui l’a obligée à s’éloigner du tennis pendant quatre ans.

Lors de sa conférence de presse de vendredi, elle a admis : « J’aime le combat. J’aime l’adrénaline. J’aime le moment qui précède mon entrée sur le court, car il a beaucoup d’énergie. Ces choses m’animent et j’aime ça. »

On se doute que la jeune fille de 19 ans qui se trouvait de l’autre côté du filet mardi ressent la même chose.

RIEN N’ÉGALE ROLAND-GARROS ET PARIS

Au premier plan, l’un des célèbres « quatre mousquetaires » français des années 1920 et 1930, Jean Borotra, et au loin, un deuxième mousquetaire, Henri Cochet. Leur succès, ainsi que celui de René Lacoste et de Jacques Brugnon dans le triomphe de la France à la Coupe Davis de 1927 à Philadelphie, a directement conduit à l’ouverture des terrains de tennis de Roland-Garros en 1928.

Vito Tongiani, le sculpteur qui a créé la statue de Borotra, a dit qu’il espérait qu’un jour, avant la finale, un joueur irait toucher le pied de Borotra pour lui porter chance. Aucun joueur ne l’a fait — pour autant que l’on sache —, mais Tony Godsick, l’agent de Roger Federer, l’a fait avant la finale de 2009 entre Federer et Robin Soderling. Cela a semblé fonctionner, car plus tard, dans la journée, le maître suisse a remporté son seul et unique titre à la porte d’Auteuil.  

Photo de l’article : Martin Sidorjak