Raducanu ready to serve

Photo : WTA

Parmi les multiples vedettes inscrites au premier des deux tournois printaniers en sol américain, Emma Raducanu a capté l’attention.

Pas pour longtemps, mais tout de même.

Serait-elle la « femme d’un milliard de dollars », comme le mentionnait le Roumain Ion Tiriac en reprenant les propos que Mark Borkowski, le gourou britannique des relations, a publiés sur Twitter après le triomphe de Raducanu à Flushing Meadows, ou sera-t-elle ce qu’on appelle souvent un « one hit wonder » dans le monde de la musique ?

Ou encore, sa carrière se situera-t-elle entre les deux ?

Pour l’instant, et en vertu d’un talent certain, maintenons l’adolescente dans cette dernière option. Un talent certain qui a été propulsé à l’avant-scène un peu rapidement.

Et elles sont tellement nombreuses… ils sont tellement nombreux ces jeunes femmes et ces garçons à être trop souvent et trop rapidement catalogués comme la prochaine grande vedette.

Emma Raducanu, après une difficile première victoire, a été sortie à son deuxième match par la Croate Petra Martic. Alors qu’elle servait pour le match à 5-4, Emma a perdu les trois jeux suivants de cette manche ultime et a dû plier bagage.

Photo : Express.co.uk

Depuis son titre inattendu aux Internationaux des États-Unis, Raducanu n’a pas livré d’autres miracles. Une décision douteuse quant au changement d’entraîneur ainsi qu’un épisode de COVID-19 et une blessure sont venus mettre du sable dans ce bel engrenage tout neuf. Et ça, ça fait partie de l’équation, avouons-le.

Sans oublier cette réalité qui attend tout prodige au terme d’une soudaine émergence comme la sienne.

Après avoir traversé son premier tournoi du Grand Chelem en remportant 10 matchs (incluant les qualifications) sans perdre une seule manche, la réalité a rattrapé la Britannique. Résultat : un dossier de 4 victoires et 7 défaites en 11 matchs.

De ces sept défaites, une seule est survenue contre une joueuse alors classée 13e à la WTA (Rybakina). La moyenne des autres classements : 87. Ces quatre victoires ont été inscrites devant des joueuses classées, en moyenne, au 90e rang.

Rien pour écrire à sa mère, comme le dit l’expression.

Clairement, les vapeurs euphoriques de septembre 2021 se sont estompées à la vitesse grand V. Mais pas l’argent éclair qui tomba dans sa besace lorsque de nombreuses entreprises, envoutées par l’alléchant potentiel athlétique et, surtout, publicitaire se sont dit : « Une (nouvelle) étoile est née ! »

Photo : Elle.com

« Je suis en train de comprendre en même temps que je progresse », continue d’avouer Raducanu.

Voilà qui me rappelle une expression qui a été entendue souvent au début de la pandémie de coronavirus quand nos gouvernements tentaient de comprendre comment contrer, juguler et se sortir de la pandémie. Rappelez-vous : « On construit l’avion en plein vol. »

Je reviens à cette déclaration d’un personnage qui a marqué le tennis de la fin du 20e siècle, Ion Tiriac.Dans le quotidien roumain Pro Sport, il a critiqué l’entourage de Raducanu pour le licenciement d’Andrew Richardson, l’entraîneur qui accompagnait la joueuse vers ce premier titre majeur. « Elle doit mieux s’entourer, si elle veut réaliser ce formidable potentiel », de conclure l’ancien joueur de tennis roumain.

Car Tiriac a beau être une grande gueule, il s’y connaît en tennis. Et en argent !

Photo : Tennis.net

Surnommé « Comte Dracula » — parce qu’il était né en Transylvanie — puis le « Bulldozer de Brazov » en raison de son caractère fonceur comme homme d’affaires, Tiriac compte tout de même 27 titres en double, dont celui de Roland-Garros en compagnie d’Ilie Nastase, son compatriote dont il devint ensuite l’entraîneur. Par la suite, comme entraîneur, agent ou conseiller, il a aidé des noms célèbres tels Guillermo Vilas, Boris Becker, Goran Ivanisevic, Mary Joe Fernandez, Marat Safin et Simona Halep.

Photo : Twitter @beckerclassics

Mais là où Tiriac va un peu vite, tout comme ces gens qui flairent l’argent et le potentiel de jeunes talents au tennis, c’est de trop insister sur le mot « milliard ». Et par le fait même, sur un futur hypothétique.

Car rien n’est plus fragile qu’une carrière sportive.

Depuis le début de ce siècle, les possibilités pécuniaires se sont décuplées pour le sport et sa médiatisation. C’est un fait. Si quelques célébrités du sport forment un club sélect de milliardaires, aucun joueur de tennis n’en fait partie.

La fortune la plus élevée pour un joueur, et pas le moindre, est celle de Roger Federer. Et elle n’atteint pas encore le demi-milliard (450 millions).

Parmi les anciens joueurs, un seul a atteint cet objectif. Ironiquement, il s’appelle Ion Tiriac (1,2 milliard).

Mais de là à contempler cet objectif pour Raducanu, 18 ans, il y a un pas.

Un très grand pas.

Quand la tête ne suit plus

C’était un samedi comme les autres au tournoi d’Indian Wells, et, outre mes favoris Fernandez et Shapovalov au programme, j’ai suivi d’autres matchs comme ça, en direct ou en différé.

Et ce 12 mars a été ponctué de toutes sortes de ces situations qui marquent régulièrement ce sport de raquette. Des matchs faciles, des matchs difficiles, des états de grâce et des gaffes. Des favoris et favorites sèchement éliminés par des adversaires moins bien classés.

Et, bien sûr, des priorités bousillées. Comme celles d’un jeune et prometteur Sebastian Korda, meneur par 5-2 et 30-30, en troisième manche, face à l’impressionnant Rafael Nadal, sur le point de subir une première défaite après 16 victoires en 2022.

Vous connaissez la suite… Le célèbre Espagnol a procédé à une autre de ces célèbres « remontadas » et il a éliminé Korda.

La force mentale est à l’origine des plus grandes remontées et des plus étonnantes dégringolades.

Mais au mot « mental », depuis quelques années, on accole maintenant « détresse ». Et de plus en plus souvent. Car c’est une réalité que vivent tant d’athlètes, tous sports confondus.

Et c’est là que ce « samedi comme les autres » est devenu un « samedi PAS comme les autres ».

Un samedi où se sont succédé les événements concernant Amanda Anisimova et Naomi Osaka, à une heure d’intervalle.

Inutile de revenir sur l’histoire de la Japonaise au cours de la dernière année. Sa situation a été suffisamment documentée et celle qui est maintenant 78e mondiale, était en pleine reconstruction jusqu’à ce nouvel épisode, aussi cruel qu’inattendu.

Son match de 2e tour, face à Veronika Kudermetova, venait tout juste de débuter quand, au 3e jeu, une spectatrice lance une insulte à Osaka. Il n’en fallait pas plus pour que tant de mauvais souvenirs des derniers mois remontent à la surface.

Photo : Clive Brunskill – Getty

Malgré des protestations à l’arbitre et la superviseuse du tournoi, l’imbécile n’a pas été expulsée et Osaka n’a plus fait qu’acte de présence, éliminée 6-0 et 6-4.

Et dans un geste inhabituel, elle a trouvé le courage de demander un microphone pour expliquer à la foule ce qu’elle ressentait, tout en faisant un parallèle avec le traitement identique, mesquin, subi par les sœurs Venus et Serena Williams, en 2000, dans ce même stade.

Photo : Clive Brunskill – Getty

Mais, tout juste avant Naomi, il y a eu Amanda.

Une Amanda qui a semblé être mise KO par ses émotions alors qu’elle était à un point d’une victoire facile. Et loin de moi l’idée d’enlever du mérite à notre compatriote Leylah Annie Fernandez, qui était l’adversaire de l’Américaine.

Mais retournons deux ans en arrière, si vous le voulez bien, soit en septembre 2019. Anisimova a été frappée par la double tragédie de perdre son père, qui était aussi son entraîneur.

Elle venait tout juste d’avoir 18 ans et occupait le 23e rang mondial. Après avoir régressé au 86e échelon deux années plus tard, elle était remontée en 43e place avant le tournoi d’Indian Wells.

Qui plus est, l’année 2022 avait bien commencé après qu’elle eut conclu un nouveau partenariat avec le réputé Darren Cahill, ex-entraîneur de Simona Halep (celle-là même qu’Amanda a surprise en quart de finale de Roland-Garros, en 2019). En janvier, ils ont remporté ensemble un tournoi préparatoire aux Internationaux d’Australie.

Pourtant, voilà qu’après un premier entraînement à Indian Wells, Cahill surprenait sa pupille — et tout le monde du tennis — en mettant fin à leur association, prétextant un surmenage accumulé. L’Australien disait devoir retourner dans son pays dare-dare.

Pas la meilleure façon d’aborder un tournoi de l’envergure d’I.W.

Tout de même, après une victoire au premier tour, Anisimova semblait sur la bonne voie pour livrer une sévère correction à Fernandez.

Et jusque vers la fin de la deuxième manche, elle livrait une superbe performance face à la Canadienne. Qui plus est, je me permettrais de qualifier sa première manche de véritable clinique, car Leylah était débordée et ne savait plus où donner de la tête face aux coups percutants et aux frappes chirurgicales de celle qui semblait appartenir au Top 3, à ce moment.

Photo : Eurosport.com

Quand elle a échappé une balle de match à 5-3, le langage corporel d’Anisimova venait de changer. Le stress se lisait dans son visage. Puis, lorsqu’elle a bousillé trois balles de match à 5-4, 40-0, c’était le début de la débandade. Elle devait ensuite passer à côté du jeu décisif perdu 0-7.

Et après la manche, elle a pris son équipement et quitté rapidement le terrain malgré les demandes répétées de l’arbitre Juan Zhang d’attendre la venue d’un thérapeute.

La raison officielle de cet abandon de l’Américaine a été justifiée par le mot « maladie » dans le communiqué de la WTA ainsi que dans un message par la principale intéressée.

Anisimova est bourrée de talent, mais force est d’admettre que les dernières années ont été de véritables montagnes russes pour la jeune femme. Et à 20 ans, il n’est pas facile de naviguer dans un tel maelström, d’en gérer les conséquences et de continuer à gagner comme si de rien n’était.

Photo : CBC.ca

La bonne nouvelle, depuis un an, c’est que de plus en plus d’athlètes, des femmes ET des hommes, n’hésitent pas à en parler et à mettre leurs activités sur pause pour s’en sortir. Tous sports confondus, dois-je le répéter ?

Espérons que nous reverrons Naomi et Amanda très bientôt.

Cressy et son as magique

Maxime Cressy est vite entré dans le cercle des frappeurs d’as de l’ATP.

Inconnu l’an dernier, l’Américain de 1,98 m s’est vite fait une place en 2022 et il occupe maintenant le quatrième rang des cogneurs d’as de l’ATP derrière ses compatriotes format géant, Reilly Opelka et John Isner, ainsi que Félix Auger-Aliassime.

Lorsqu’ils affrontent le 72e joueur mondial, ses rivaux sont prêts à faire face à ces coups de canon et font ce qu’ils peuvent pour retourner ses premières balles.

Mais, le 10 mars dernier à Indian Wells, jamais Christopher Eubanks n’aurait pu se préparer à… ÇA !

Toute l’histoire est ici.

Accompagnée des réactions et du tracé de la balle par le système Hawk-Eye !


Courriel : privard@tenniscanada.com

Twitter : @paul6rivard

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