Ash Barty punches the air in celebration after winning a match

Photo : Wimbledon

Cette édition de Wimbledon, après une pause d’un an, était remplie de promesses. Mais ce sont plutôt les surprises et son herbe célèbre qui ont retenu l’attention.

Ultimement, si les numéros un mondiaux sont couronnés les 10 et 11 juillet, ces froncements de sourcil ne paraîtront pas dans les livres de records. Sinon, on pourrait longtemps parler de la pelouse de 2021.

Par « froncements de sourcils », je faisais bien sûr allusion à l’état du terrain qui, cette année, a entraîné glissades et chutes en série.

Dans mon texte de l’édition précédente, j’avais souligné la dangerosité que représentait cette surface, texte rédigé AVANT le tournoi et mis à jour avec les cas d’Adrian Mannarino et Serena Williams.

Mais j’étais loin de me douter que, malheureusement, l’édition 2021 allait m’en fournir des preuves tristement nombreuses. Inutile de revenir là-dessus, compte tenu du fait que les médias en ont abondamment fait mention et que la direction du tournoi a répété à qui voulait l’entendre qu’elle avait tout fait ce qui était humainement, techniquement et « végétalement » possible pour livrer des conditions de terrain à la hauteur de leur réputation.

Le tableau masculin, déjà marqué par l’absence de deux de ces vedettes, Rafael Nadal (3e) et Dominic Thiem (5e), n’a pas trop souffert de ces conditions. Et, pour nous, comment ne pas être excité d’avoir vu les Denis Shapovalov et Félix Auger-Aliassime atteindre les quarts de finale de ce grand tournoi. Jamais deux Canadiens n’avaient atteint cette étape dans une même compétition du Grand Chelem.

felix celebrates a wimbledon win
Photo : Martin Sidorjak/Tennis Canada

À l’autre bout du spectre, le tableau des dames a présenté une évolution des plus surprenantes au fur et à mesure de sa progression vers le milieu de la deuxième semaine.  

Outre les absences prétournoi annoncées par Naomi Osaka et Simona Halep, les stars de la WTA n’étaient pas très nombreuses le matin du « lundi fou » (Manic Monday), jour traditionnel des huitièmes de finale. Elles n’étaient que trois du Top 10 ou six du Top 20. Les Barty (1re), Sabalenka (4e), Iga Swiatek (9e), Pliskova (13e), Krejcikova (17e) et Rybakina (20e) étaient plutôt accompagnées des Muchova (22e), Gauff (23e), Jabeur (24e), Keys (27e), Kerber (28e), Badosa (33e), Samsonova (65e), Golubic (66e), Tomljanovic (75e) et Raducanu (338e)

Peu usuel, reconnaissons-le. Mais aux absences d’Osaka et de Halep se sont ajoutées les sorties hâtives des Andreescu, Williams, Bencic, Kvitova et Bertens (1er tour) ainsi que celles des Svitolina, Kenin, Azarenka et Sakkari (2tour). Voilà qui fait mal à des organisateurs de tournois… mais qui donne conséquemment la chance à de nouveaux visages d’émerger, à démontrer la belle parité dont est fait le tennis féminin.

Cette semaine n’aura pas été que controversée en raison de sa surface glissante. Elle en a été intrigante sur le plan des statistiques. Comme ce record de vélocité établi par trois joueuses, au service : Coco Gauff, Liudmila Samsonova et Aryna Sabalenka, soit 121 mph ou, si vous préférez, 194,7 km/h. À titre indicatif, le record absolu d’un service féminin (et reconnu officiellement par la WTA) est détenu par l’Allemande Sabine Lisicki (131 mph ou 210,8 km/h).

Chez les hommes, la bombe était italienne. Matteo Berettini a frappé une balle à 139 mph (223,6 km/h), bien loin toutefois du record absolu (et officiel de l’ATP) de 157,2 mph (253 km/h) que détient John Isner.

La présence des Raducanu et Samsonova, dans la deuxième semaine d’un tournoi du Grand Chelem est une première. Jamais deux détentrices de laissez-passer n’avaient atteint cette étape auparavant, peu importe le tournoi majeur.

Au cours de cette première semaine, Roger Federer avait utilisé la combinaison service-volée un total de 29 fois, plus que tout autre participant. Non seulement ce style a aidé le Suisse à forger ses incroyables succès, mais on peut également comprendre qu’à un mois de son quarantième anniversaire de naissance, Federer ne peut plus se permettre de disputer des matchs de cinq manches, peuplés d’échanges interminables. Le service-volée raccourcit les points et les matchs. Pour le meilleur de Roger ou… pour le pire.

Emma, comme Denis

Elle n’a que 18 ans et elle est devenue la plus jeune Britannique de l’histoire de son pays à se rendre en huitième de finale du plus prestigieux de tous les tournois de tennis, celui de son pays.

En Angleterre, on craque désormais pour Emma !

Vous vous rappelez certainement ce mois d’août 2017 lorsqu’un jeune Canadien ayant obtenu un laissez-passer par les dirigeants du tournoi de son pays les avait faits… disons… plutôt bien paraître ? Lui, longs cheveux blonds, casquette à l’envers, sans peur et tellement plein d’énergie qu’il en sortait presque de ses culottes.

Denis Shapovalov !

Alors âgé de 18 ans et 4 mois, Shapo avait éliminé dans l’ordre les Dutra Silva, Del Potro, Nadal, Mannarino avant de s’incliner en demi-finale face à Zverev.

Comme vous n’avez certainement pas oublié les frissons d’une nation lors de cette semaine unique dans les annales du pays, vous devinez un peu ce que vivent les Britanniques depuis le début de leur tournoi. Car une jeune compatriote est en train de leur faire ressentir le même type d’émotions. Et là, ce n’est pas un Masters 1000, mais bien le plus prestigieux des tournois de tennis.

Emma Raducanu est âgée de 18 ans et 8 mois.

Elle était classée 338e au début de cette édition de Wimbledon. Elle n’avait que 23 JOURS d’expérience au sein de la WTA lorsqu’elle a disputé son premier match.

Dans l’ordre, elle a éliminé la Russe Vitalia Diatchenko (150e), la Tchèque Marketa Vondrousova (42e), ainsi que la Roumaine Sorana Cirstea (45e) avant d’être contrainte à l’abandon lors de son duel contre l’Australienne Ajla Tomljanovic (75e). Fort probablement submergée par l’intensité des dernières semaines, des problèmes apparents de respiration l’ont forcée à déclarer forfait alors qu’elle tirait de l’arrière 4-6 et 0-3. Cela dit, Raducanu aura réussi un exploit inégalé en raison de sa précocité et verra son classement WTA passer de la 338e à la 175e place. Elle qui totalisait 51 000 $ canadiens de gains depuis le début de sa carrière, vient de s’enrichir de près de 310 000 $.

Et, bonus, elle aura mis un baume sur la plaie que constituait l’élimination du héros national, Andy Murray, quelques jours auparavant, aux mains de (tiens donc…) Denis Shapovalov.

Et puisqu’il est question d’Andy Murray, une connexion autre que celle du pays la relie au champion écossais. Depuis qu’elle a 15 ans, son entraîneur n’est nul autre que Nigel Sears, le beau-père d’Andy Murray.

Emma Raducanu est née au Canada (Toronto) d’une mère chinoise et d’un père roumain avant d’arriver à Londres à l’âge de deux ans. On dit d’elle qu’elle est un bel exemple du multiculturalisme britannique. Comment ne pas faire un dernier lien avec le multiculturalisme canadien lorsqu’on se rappelle que notre Denis est né en Israël de parents russes et que c’est au Canada qu’il a pris racine avant de pousser et de devenir ce si beau « fleuron » de notre histoire tennistique ?

L’année de Jabeur?

La Tunisienne Ons Jabeur a poursuivi son irrésistible poussée de 2021.

Son tableau de chasse à Londres montre des victoires contre Rebecca Peterson au premier tour, mais surtout face à Venus Williams, Garbine Muguruza et Iga Swiatek dans l’ordre. C’est du solide.

Il y a deux semaines, il avait été question dans ce blogue des records personnels et identitaires de la Tunisienne Ons Jabeur.

Sur le gazon de Birmingham, elle venait notamment de remporter le premier tournoi WTA de sa carrière en plus d’atteindre son meilleur classement à vie.

Ce 20 juin, elle disait être heureuse de sa réussite, mais également désireuse de donner l’exemple. « Je savais que je devais foncer, je devais gagner ce titre pour enfin respirer et donner l’exemple. Il n’y a pas beaucoup de Tunisiennes ou d’Arabes qui jouent, alors j’espère que cela pourra les inspirer et je veux voir plus de joueurs et de joueuses arabes et tunisiens jouer avec moi sur le circuit. »

Noble pensée d’une athlète persévérante. Car, en effet, on peut presque compter sur les doigts d’une main le nombre des athlètes du Moyen-Orient, avant Jabeur, à avoir figuré dans le Top 100 mondial, hommes ou femmes confondus.

Le Marocain Younes El Aynaoui a grimpé jusqu’au 14e échelon de l’ATP en 2003, faisant de lui le tennisman arabe le mieux classé de l’histoire. El Aynaoui s’est rendu quatre fois en quart de finale d’un tournoi du Grand Chelem.

Ses compatriotes Hicham Aziri et Karim Alami ont pu atteindre respectivement les 22e (2001) et 25e rangs (2000) de l’ATP. L’Égyptien Ismail El Shafei a obtenu son meilleur classement (34e) en 1975, 11 ans après avoir remporté le titre junior à Wimbledon. En 1974, il s’était rendu en quart au All-England Club, ayant battu en cours de route… Bjorn Borg !

Bjorn Borg hitting a forehand
Photo : Allsport/Tennis Canada

La suite, pour l’athlète native de Ksar Hellal, c’est une 23e position au classement WTA (en hausse d’une place) et, une confiance solidifiée en vue du reste de la saison. 

Plus important encore, une place de choix dans les annales du tennis arabe et dans le coeur de ses compatriotes.

Draxl monte!

Après une saison universitaire exceptionnelle, aux États-Unis, Liam Draxl continue sa progression chez les professionnels.

D’abord, l’Ontarien de 19 ans s’était incliné au deuxième tour d’un tournoi Challenger, à Cleveland. Voilà qu’il vient de se rendre en finale d’un tournoi ITF doté de 15 000 dollars en bourse, sur la terre battue de Weston, en Floride.

Draxl, actuellement classé au 807e rang de l’ATP, affrontait Stefan Koslov, un américain de 23 ans classé au 347e échelon. Leur finale a toutefois été interrompue avant la troisième et ultime manche et s’est soldée par un verdict nul. Koslov avait remporté le permier set 7-6 (5) avant de voir le Canadien gagner le second 6-3.

Dans l’ordre, Liam a écarté le Brésilien de 33 ans, Thomaz Bellucci (320e), l’Américain de 38 ans Jesse Witten (1568e), un autre Américain, de 26 ans celui-là, Strong Kirchheimer (518e) ainsi que l’Argentin de 26 ans Gonzalo Villanueva (399e)

Tous les points en banque sont bienvenus et c’est aux alentours de la 750e place que Draxl devrait se retrouver bientôt. Un bond de quelques 60 positions.

Rappelons que le Canadien a complété sa dernière campagne avec un dossier de 25 victoires contre trois défaites seulement sous les couleurs des Wildcats de l’Université du Kentucky. Lors des éliminatoires de la NCAA, il avait atteint le stade des demi-finales. À partie du 14 avril dernier, il était le joueur numéro un de tout le tennis universitaire américain. À sa deuxième année seulement.

Liam Draxl hits a backhand slice in an indoor court
Photo : Grace Bradley/Tennis Canada

Courriel : privard@tenniscanada.com

Twitter : @paul6rivard

Pour suivre tous nos Canadiens à la trace, c’est ici.

Tags