Photo : Serge Philippot

Cette image me fascine. Quand on dit qu’une photo vaut mille mots…

Photo : Twitter/@YCochennec (Tennis Magazine)

C’était en 1983.

Un joueur de tennis avait la foule, que dire, le pays à ses pieds. SON pays, la France. Il s’appelle Yannick Noah et il est le dernier Français à avoir triomphé sur la terre parisienne. SA terre.

Pour la première fois depuis 1946, soit 37 années auparavant, un fils de l’Hexagone remportait cette deuxième levée du Grand Chelem. À l’époque, il s’appelait Marcel Bernard et les hommes disputaient leurs matchs avec des pantalons longs…

Noah avait littéralement survolé cette édition à la Porte d’Auteuil.

Photo : FFT

Sixième tête de série, il avait successivement éliminé Anders Jarryd, Victor Pecci, Patrick DuPré, John Alexander, Ivan Lendl, Christophe Roger-Vasselin et Mats Wilander. En sept matchs, il n’avait cédé qu’une toute petite manche, à Lendl, alors 3e tête de série. Ce même Lendl, son ennemi juré depuis cette finale junior de l’Orange Bowl 1977, quand il s’était incliné devant le Tchécoslovaque.

Photo : Twitter/@TousPoulidor

Les photos suivantes ont 40 ans, mais ne vieilliront jamais. Comment ne pas frémir à l’image de l’idole, rejointe par son père Zacharie Noah, sur le central de Roland-Garros ? Zacharie, ex-athlète camerounais (soccer) venait de voir ses gènes exploser dans un autre sport, devant la foule de son pays d’adoption.

Photo : Twitter/@Sportstricolore
Photos : Twitter/@lequipeEXPLORE

Si ce titre demeure le seul en GC pour Yannick Noah, sa carrière aura été tout de même étincelante, car il demeure tout simplement le meilleur joueur de l’histoire moderne du tennis français, devant les Tsonga, Lecomte, Forget et Monfils, dans l’ordre.

Noah a remporté 23 titres – en plus de participer à 13 autres finales – et s’est hissé au troisième rang mondial en juillet 1986. Un mois plus tard, le même été, il atteignait le premier rang mondial en double.

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C’est d’ailleurs avec un nombre impressionnant de six partenaires qu’il a remporté 16 titres de double, dont celui, eh oui, de Roland-Garros en 1984 (avec Mats Wilander), un an après son exploit en simple. Son plus fidèle coéquipier fut Guy Forget, avec qui il a soulevé 9 de ses 16 trophées.

Les hommages et émissions spéciales de plusieurs grands médias français consacrent cet été 2023, depuis l’anniversaire de Noah, le 18 mai, jusqu’à ce 5 juin prochain, jour commémoratif du 40e anniversaire d’une victoire que personne n’a oublié en France.

Entretemps, l’organisation du tournoi avait préparé son coup. Ou plutôt, ses coups.

Déjà, le 27 mai avait été nommé « Journée Yannick Noah ».

Photo : Amélie Laurin/FFT

Après avoir fait défiler plusieurs vedettes dans le grand stade Philippe-Chatrier pour des entraînements ouverts au public, sur le coup de 14 h, heure locale, le héros du jour y a donné un concert. Car si certain(e)s d’entre vous l’ignoraient, Noah a également fait une carrière de musicien. Le chanteur franco-camerounais a sorti pas moins de 12 albums entre 1990 et 2022.

Image : Twitter/@ArthurNys
Photo : AFP
Photo : P. Lahalle/L’Équipe

Comme dessert, il s’est produit avec un trio tout tennistique, accompagné du Suédois Mats Wilander ancien numéro un mondial et trois fois titré à RG (1982, 1985 et 1988) ainsi que le Franco-Iranien Mansour Bahrami, qui ont également été partenaires de double de Noah, à l’époque.

Photo : Twitter/@rolandgarros

Pour avoir une idée de l’ambiance qui y régnait, vous trouverez une vidéo des trois premières minutes, ici : Tennis. Roland-Garros – Yannick Noah, en plein concert… son titre en 1983 ! – TennisActu

Tous les profits de cette journée vont à une fondation caritative axée sur le développement du tennis pour les jeunes défavorisés. Nommée « Fête le Mur », cette fondation est parrainée par Noah depuis maintenant 30 ans.

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Le lendemain, dimanche et premier jour de compétition, on lui a porté un merveilleux coup de grâce en dévoilant une fresque à son honneur.

Photos : FFT

Revenons à la photo qui coiffe ce texte. Si vous avez eu l’impression que je vous faisais jouer à « Où est Charlie ? », alors voici un dernier coup de main – ou coup d’œil. Vous pourrez repérer Yannick Noah, dans cette mer humaine, en bas du cliché.

Photo : Tennis Magazine

Une absente bien… présente

Photo : Photo News

Rafael Nadal est plus grand que nature, un peu comme la statue qui lui rend hommage depuis le 27 mai 2021 sur le site du tournoi de Roland-Garros.

Sur l’ocre parisienne, Nadal restera le plus grand joueur de l’histoire et 2023 marque la première fois en 19 ans qu’il en sera absent. Donc, rarement un athlète n’aura suscité autant de commentaires en n’y étant pas. On parle presque plus de son absence, cette année, que de sa présence, lors des éditions précédentes.

C’est vous dire.

Car lorsqu’un absent fait autant sentir sa présence, c’est que son esprit hante la place.

Photo : Eurosport

De là à dire qu’il est déjà le fantôme de Roland-Garros, il n’y a qu’un pas.

Un jour, certes, le fantôme du Majorquin occupera l’air ambiant de Roland-Garros de façon permanente, tels les quatre fameux mousquetaires René Lacoste, Henri Cochet, Jean Borotra, et Jacques Brugnon, des légendes françaises sur lesquelles j’avais d’ailleurs écrit, dans le cadre de ce blogue, édition du 26 mai 2021.

Dans ce groupe d’immortels, Nadal sera le plus grand, et de loin.

Photo : Eurosport

La liste des exploits et faits concernant son épopée sur terre battue, en général, et à Roland-Garros en particulier donne le tournis.

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Soulignons qu’il n’a jamais concédé deux manches à ses rivaux lors des 14 finales qu’il a remportées. Il a triomphé sept fois en trois manches et sept autres fois en quatre manches. Qui plus est, lors de ses cinq dernières finales, il a n’a concédé qu’une manche.

Voici quelques-uns des records qui ne seront jamais approchés.

Infographie : Roland-Garros
  • 14 victoires en 14 finales
  • 115 matchs : fiche de 112-3
  • 97,39 % des matchs remportés
  • 74 victimes sur l’ocre de Paris
  • 8 fois, il y a vaincu Novak Djokovic
  • 6 fois, il y a vaincu Roger Federer

Le seul record qu’il ne détiendra pas est celui du nombre de participations consécutives. Cette marque est de 21 et appartient à son compatriote Feliciano Lopez (2001-2021). Le Serbe Novak Djokovic suit avec 19 (2005-2023) incluant cette année. Quant à Rafa, il s’est arrêté à 18 (2005-2022) à égalité avec le Russe Mikahil Youzny (2001-2018) et l’Argentin Guillermo Vilas (1972-1989).

Photo : Christophe Guibbaud/FFT

Contrôle à distance

Photo : Twitter/@InteBNLdItalia

Même si plusieurs athlètes adoptent une position éloignée pour recevoir les puissants services de leurs adversaires, on peut classer Daniil Medvedev dans la catégorie de ceux qui sont les plus reculés.

C’est sûr que le Russe s’asseyait toujours dans la dernière ranger de l’autobus scolaire et de la classe quand il était enfant.

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Rafael Nadal faisait la même chose, rappelons-nous, au point de disparaître des plans de caméras dans certains stades. Comme ici, au US Open de 2019, contre les offrandes de Matteo Berrettini. Ou encore contre John Isner, à Monte-Carlo, en 2015.

Image : Amazon Prime
Image : Deportes 2

À la blague, on disait de lui qu’il attendait le service bien installé dans le vestiaire. Ou encore qu’il adorait être près de ses fans.

Pour revenir au cliché qui coiffe ce texte, il a un petit cachet supplémentaire par le fait que la personne qui a pris la photo utilisait une lentille grand-angle. Cet effet donne à la tête de raquette une apparence surdimensionnée, permettant d’y voir la tête du joueur et une partie de ses épaules parfaitement… cadrées.

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Qui plus est, le grand angle rallonge la profondeur de champ au point que son rival semble si loin qu’il doit avoir les deux pieds dans un lieu avec un autre code postal indicatif régional…

Ultimement, ces positions éloignées sont une arme à double tranchant. D’une part, elles permettent à l’athlète d’allonger son temps de réaction. Inversement, elles donnent des angles extraordinaires à l’adversaire au service. Et même si on peut retourner un service en angle, on se sort littéralement du terrain pour le coup suivant.

Rien n’est parfait.

Photo : Reuters

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